juin 01, 2007

Le conflit d’intérêt

L’actualité nous parle abondamment du concept de conflit d’intérêt. Comment est-il réglementé, quelles sont les obligations des dirigeants?

Tout d’abord, le premier devoir des dirigeants est de respecter les limites des pouvoirs qui leur ont été conférés. Le Code civil du Québec (ci-après C.c.Q) précise que les administrateurs doivent agir avec prudence, diligence, honnêteté et loyauté dans l’intérêt de la personne morale (art. 322, 2138 C.c.Q). Cette dernière est une entité légalement constituée, dotée d’une personnalité juridique indépendante de celle de ses membres et à qui la loi reconnaît des droits et des obligations. La Loi sur les Sociétés par actions (ci-après LSA) leur impose des obligations similaires. Ils doivent agir avec honnêteté et loyauté dans le meilleur intérêt de la compagnie et avec le soin, la diligence, et la compétence dont ferait preuve une personne diligente, en pareilles circonstances (art. 122(1) (a) et (b)). Plus concrètement, quatre devoirs généraux leur sont imposés , soit :

1. Agir dans les limites de leurs pouvoirs
2. Agir avec habilité et compétence
3. Agir avec prudence et diligence dans l’intérêt de la personne morale
4. Agir avec honnêteté et loyauté dans l’intérêt de la personne morale.

Les administrateurs sont tenus d’agir avec honnêteté et loyauté. Cette obligation découle de deux sources, soit leurs devoirs de fiduciaires (art. 122(1) (a) LSA, 1309 et ss. et 322 C.c.Q et ss.) et leurs obligations de mandataire (2138 C.c.Q.) En vertu des devoirs d’honnêteté et de loyauté, les administrateurs doivent donc éviter de se placer en conflits d’intérêts.

Les administrateurs doivent donc éviter de se placer dans une situation où leurs intérêts personnels entrent en conflits avec ceux de la compagnie. Si des conflits potentiels ou présents existent, ils sont tenus de les divulguer (art. 120 (1) à (7) LSA et 324 C.c.Q.).

Cette obligation prévue à l’article 324 C.c.Q. est complétée par d’autres dispositions prévoyant des prohibitions spécifiques, notamment celle interdisant à l’administrateur de contracter avec la personne morale relativement aux biens de la compagnie ou de se porter partie à tout acte qu’il doit conclure pour la compagnie (2147 C.c.Q.). Notons que ces interdictions peuvent être levées sous certaines conditions, notamment, si l’administrateur ou le dirigeant a communiqué son intérêt, et les administrateurs de la société ont approuvé le contrat ou l’opération et qu’au moment de son approbation, le contrat ou l’opération était équitable pour la société (120(7) LSA). Aussi, tout administrateur peut, même dans l'exercice de ses fonctions, acquérir, directement ou indirectement, des droits dans les biens qu'il administre ou contracter avec la personne morale. Il doit signaler aussitôt le fait à la personne morale, en indiquant la nature et la valeur des droits qu'il acquiert, et demander que le fait soit consigné au procès-verbal des délibérations du conseil d'administration ou à ce qui en tient lieu. Il doit, sauf nécessité, s'abstenir de délibérer et de voter sur la question. (325 C.c.Q.)

Pour que le contrat soit valable entre la compagnie et l’administrateur, ce dernier doit préalablement divulguer son intérêt au conseil d’administration. Le conseil d’administration ou les actionnaires doivent également approuver le contrat.

En conclusion, comme le souligne Me Jean-Claude Hébert dans son ouvrage intitulé Droit pénal des affaires, dans le milieu des affaires, les occasions de conflits d’intérêts sont fréquentes. Notamment, le système financier canadien évolue vers une plus grande diversification des services et une concentration marquées des institutions financières. Un contexte de décloisonnement favorise donc l’émergence de conflits d’intérêts.
Ce n’est pas l’existence de conflits d’intérêts qui est répréhensible que les abus qui pourraient en découler.

Note de l'auteur: L'information contenue dans cette chronique est générale et ne constitue pas un avis juridique

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