octobre 30, 2009

Les indications et pratiques commerciales douteuses

Le 6 mars 2009, le Bureau de la concurrence émettait un communiqué selon lequel Moores Vêtements pour Hommes avait accepté de modifier immédiatement toute sa publicité concernant la vente au rabais de ses complets griffés à deux pour le prix d’un à l’échelle nationale. Plus précisément, Moores annoncait la vente au rabais de ses complets griffés à deux pour le prix d’un sans indiquer adéquatement que la vente ne s’appliquait qu’à certains de ses complets griffés, ce qui soulèvait des questions quant au respect des dispositions de Loi sur la concurrence relatives aux indications trompeuses. Moores avait alors convenu d’indiquer dans ses publicités télévisées, dans son site Web et dans sa signalisation en magasin que la vente au rabais ne s’appliquait qu’à certains complets griffés.

Ce communiqué me permet de faire un bref survol des indications et pratiques commerciales douteuses. En premier lieu, rappelons que la Loi sur la concurrence (si après la «Loi») est une loi fédérale régissant la conduite de la plupart des entreprises au Canada. Elle contient des dispositions civiles et criminelles ayant pour but de prévenir des pratiques anticoncurrentielles sur le marché.

Plus précisément, la Loi contient des dispositions concernant les indications fausses ou trompeuses et les pratiques commerciales trompeuses ayant pour but de promouvoir la fourniture ou l'utilisation d'un produit ou tout intérêt commercial. Toutes les indications qui sont fausses ou trompeuses sur un point important sont assujetties à la Loi. L'indication est fausse ou trompeuse sur un point important si elle peut inciter le consommateur à acheter ou utiliser le produit ou le service annoncé. Pour déterminer si l'indication est fausse ou trompeuse, les tribunaux tiennent compte de « l'impression générale » qu'elle donne ainsi que de son sens littéral.

La Loi interdit particulièrement le télémarketing trompeur (défini à l’article 52.1 de la Loi comme étant « la pratique de la communication téléphonique interactive pour promouvoir directement ou indirectement soit la fourniture ou l’utilisation d’un produit, soit des intérêts commerciaux quelconques», l'envoi de documents trompeurs concernant un « prix gagné » et les systèmes de vente pyramidale. Elle définit aussi les responsabilités des exploitants et des participants dans des systèmes de commercialisation à paliers multiples. Les pratiques commerciales trompeuses, telles que l'annonce à un prix d'occasion d'un produit qui n'est pas fourni en quantités raisonnables, la vente d'un produit à un prix supérieur au prix annoncé, et l'organisation d'un concours, d'une loterie ou d'un jeu de hasard ou d'adresse sans une divulgation convenable et loyale de faits qui modifient d'une façon importante les chances de gagner, sont également touchés par la Loi.

La Loi prévoit deux procédures pour les cas d'indications et pratiques commerciales trompeuses. Selon la procédure criminelle, les tribunaux de compétence criminelle sont saisis de certaines pratiques et, dans ces cas, chaque élément des infractions doit être prouvé hors de tout doute raisonnable. Une personne trouvée coupable par procédure sommaire est passible d'une amende maximale de 200 000 $, d'un emprisonnement maximal d’un an, ou des deux. Si une personne est reconnue coupable par mise en accusation, elle est passible d'une amende à la discrétion du tribunal, d'un emprisonnement maximal de cinq ans, ou des deux.

Selon la procédure civile, certaines pratiques peuvent être soumises au Tribunal de la concurrence, à la Cour fédérale ou à la cour supérieure d'une province (art. 74.09 de la Loi), où chaque élément des infractions doit être prouvé selon la prépondérance des probabilités. La cour compétente peut ordonner à la personne de cesser son activité, de publier un avis et de payer une sanction administrative pécuniaire. Lors d'une première infraction, les personnes physiques sont passibles d'une sanction maximale de 50 000 $ et les personnes morales, de 100 000 $ (art. 74.1 de la Loi).

Note de l'auteur: L'information contenue dans cette chronique est générale et ne constitue pas un avis juridique

octobre 01, 2009

L’importance de la preuve de l’usage de la marque de commerce

Selon l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T‑13 (ci après «la LMC»), la preuve de l’usage permet à la marque de commerce de demeurer dans le registre. Ce principe a de nouveau été confirmé dans l’arrêt Vêtement Multi-Wear Inc. c. Riches, McKenzie & Herbert LLP, 2008 CF 1237, sous la plume de l’Honorable Juge Shore.

Vêtement Multi-Wear inc. fabrique et vend des vêtements pour dames à des magasins de détail au Canada et aux États-Unis sous la marque de commerce L'Amadei. La marque a été enregistrée en 1998.

En 2007, le registraire des marques de commerce lui a fait parvenir un avis en vertu de l'article 45 LMC. Vêtement Multi-Wear n'a pas déposé de preuve et l'enregistrement a été radié. Multi-Wear en appelle de la décision.

Le Tribunal note que la nouvelle preuve déposée par Multi-Wear démontre un nombre significatif de transactions commerciales dûment documentées par des factures. Il cite alors le juge Frederick Gibson dans Les Compagnies Molson Limitée c. Halter (1976), 28 C.P.R. (2d) 158 (C.F. 1re inst.), [1976] A.C.F. no 302 (QL), qui indique que l’usage doit être de nature commerciale : «Pour prouver l'emploi au Canada d'une marque de commerce pour les fins de la Loi, il faut établir, avant tout, une opération commerciale ordinaire par laquelle le propriétaire de la marque de commerce conclut un contrat avec un client qui lui commande les marchandises portant la marque de commerce et livre à ce dernier ces marchandises conformément au contrat. Autrement dit, suivant les dispositions de l'article 4, l'emploi doit avoir lieu « dans le cadre des affaires courantes » au moment du transfert du droit de propriété où de la possession de ces marchandises». Comme le souligne l’arrêt Philip Morris Inc. c. Imperial Tobacco Ltd., [1987] 8 F.T.R. 310, 13 C.P.R. (3d) 289, «la preuve d’une seule vente effectuée dans le cours normal du commerce a été déclarée suffisante à condition qu’elle soit considérée comme une véritable transaction commerciale et qu’elle ne soit pas perçue comme ayant été conçue délibérément pour protéger l’enregistrement de la marque de commerce».

Or, Mme Paola Altomonte , présidente de Vêtement Multi-Wear inc. a fourni des factures pour seize ventes de vêtements pour femmes portant la marque de commerce L’Amadei sur les étiquettes de ces vêtements. Sur ces seize ventes, six ont eu lieu avec des entreprises canadiennes et les dix autres ventes ont eu lieu avec un client situé aux États‑Unis. Ces ventes ont eu lieu entre le 29 mars 2005 et le 27 mars 2007, soit dans la période de trois ans prescrite par la procédure engagée selon l’article 45. À partir du contenu des factures, le Tribunal pouvait tirer l’inférence que ces vêtements pour femmes avaient été livrés à la suite de contrats de vente

Le Tribunal conclut que Multi-Wear a démontré l'usage de la marque durant la période pertinente. La décision du registraire est renversée et l'enregistrement est maintenu.

Note de l'auteur: L'information contenue dans cette chronique est générale et ne constitue pas un avis juridique

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