janvier 28, 2010

La responsabilité personnelle d’un cadre dirigeant ou administrateur quant à la commercialisation trompeuse et concurrence déloyale

Dans le cadre d’une poursuite pour contrefaçon d’une marque de commerce, les défendeurs Richard Glover et Michael Kichuk ont présenté une requête pour jugement sommaire afin de faire rejeter les conclusions prises contre eux personnellement (Franco Petrillo et al. c. Allmax Nutrition Inc. et al., 2006 CF 1199). La requête portait sur la question litigieuse à l'égard de la responsabilité personnelle de M. Kichuk par suite de la présumée usurpation de la marque de commerce "ISO-FLEX".

Rappelons tout d’abord les faits : Frank Petrillo est le propriétaire inscrit de la marque de commerce "ISO-FLEX" et du dessin y afférent, enregistrés en vue de leur emploi en liaison avec des suppléments diététiques et d'autres produits nutritionnels. Une action a été intentée au mois de décembre 2005 alléguant que M. Petrillo est l'unique actionnaire et administrateur des sociétés demanderesses, qui ont censément employé la marque ISO-FLEX en liaison avec les marchandises énumérées.

La preuve soumise par M. Kichuk établit qu'il est dirigeant et administrateur de Healthy Body Services Inc. depuis que cette dernière a été constituée en société en 1997. À l'heure actuelle, il est l'unique administrateur de la société et il est responsable de la gestion générale de l'entreprise dans son ensemble. Healthy Body Services Inc s'occupe de la distribution de suppléments nutritionnels et diététiques, notamment de concentrés de protéines, auprès des détaillants. Les produits offerts par Healthy Body Services Inc sont fabriqués par diverses sociétés. Depuis 2002, Allmax Nutrition Inc. est l'un de ces fabricants. Allmax a été constituée en société au mois de novembre 2002. M. Kichuk est également dirigeant et unique administrateur de cette société. Allmax fabrique une ligne de produits et de suppléments nutritionnels, dont l'un s'appelle "ISOFLEX Whey Protein Isolate". M. Kichuk est celui qui a choisi le nom "ISOFLEX" pour le produit nutritionnel qui fait l'objet du litige. Ce dernier a ensuite effectué une recherche de marque de commerce, laquelle, selon lui, a révélé qu'il y avait de 10 à 12 enregistrements, mais aucune ne se rapportait à l'industrie alimentaire. M. Kichuk déclare sous serment que sa recherche ne lui a pas permis de découvrir la marque "ISO-FLEX" de M. Petrillo, laquelle comporte un trait d'union entre les deux syllabes contrairement à la marque "ISOFLEX" d'Allmax, qui est composée d'un seul mot. M. Kichuk déclare également qu' il n'avait jamais entendu parler de M. Petrillo, ni d'aucune des sociétés de M. Petrillo ou des produits que M. Petrillo vendre avant de choisir le nom "ISOFLEX" en 2002.

Le Tribunal déclare qu’en principe les entreprises constituées en société ont une personnalité juridique distincte de celle de leurs administrateurs et dirigeants, qui bénéficient habituellement de la responsabilité limitée qu'offre la constitution en société. Cependant, il y a des cas dans lesquels la conduite de l'administrateur ou du dirigeant en question est telle que sa responsabilité personnelle est déclenchée. Le Tribunal fait également un survol de la jurisprudence et soulève le fait que la participation aux actes d'une société déclenche une responsabilité personnelle de la part de l'administrateur ou du dirigeant de la société qui si elle a un caractère conscient, délibéré et intentionnel.

Le Tribunal mentionne également qu’il n'existe aucune raison pour laquelle de petites sociétés composées d'une personne ou deux ne devraient pas bénéficier de la même approche que les grosses sociétés, sur le plan de la responsabilité personnelle, simplement parce qu'il existe généralement et nécessairement, en ce qui concerne la gestion, un plus grand degré de participation personnelle directe de la part des actionnaires et administrateurs. Le simple fait que les défendeurs individuels sont les uniques actionnaires et administrateurs d'une société n'est pas en soi suffisant pour qu'il soit possible d'inférer que la société était leur agent ou instrument dans l'accomplissement des actes de contrefaçon, ou qu'ils ont autorisé de tels actes, de façon à se rendre personnellement responsables.

La preuve de M. Kichuk montre qu'au moment où il a choisi la marque ISOFLEX, il n'avait pas connaissance de l'existence de la marque du demandeur. La preuve présentée par M. Kichuk montre également qu'avant d'employer le nom "ISOFLEX", celui-ci a fait preuve d'une diligence raisonnable en procédant à une recherche au sujet de la marque de commerce, recherche qui ne lui a pas permis de découvrir l'existence de la marque des demandeurs.

Finalement, le Tribunal déclare qu’il n’y a aucune preuve supportant les allégations à l’encontre de M. Kichuk à l’effet qu’il aurait délibérément adopté une conduite témoignant une indifférence face au risque de contrefaçon.

Note de l'auteur: L'information contenue dans cette chronique est générale et ne constitue pas un avis juridique

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