mars 30, 2010

Les concours publicitaires, la protection et la sécurité du public

La Régie des alcools, des courses et des jeux, qui relève du ministre de la Sécurité publique, a pour mandat d’encadrer et de surveiller les quatre secteurs d’activité que sont l’alcool, les courses de chevaux, les jeux et les sports professionnels de combat, et ce, dans le but d’assurer la sécurité, la tranquillité et l’intérêt publics.

Plus précisément, en vertu de l’article 2 de la Loi sur la régie des alcools, des courses et des jeux (ci-après la «LRACJ») , la Régie est chargée de l’administration de la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d’amusement. En vertu l’article 23(4°) de la LRACJ, la Régie est l’organisme habilité à régir et surveiller les concours publicitaires. Par conséquent, suivant l’article 23(5°) de la LRACJ, elle veille, suivant son champ de compétence, à la protection et à la sécurité du public à l’égard de l’organisation et du déroulement des concours publicitaires.

Dans la réalisation de sa mission, la Régie émet, si rien ne s’y oppose, des permis, des licences et des autorisations permettant l'exercice des activités qu’elle administre. Pour s’assurer du respect des conditions relatives à l’exploitation de ceux-ci, la Régie effectue des enquêtes et des inspections. Celles-ci sont effectuées en collaboration avec la Sûreté du Québec, le Service de police de la Ville de Montréal de même que tous les services de police municipaux. Lorsque des manquements sont allégués, la Régie convoque le titulaire en audience.

Or, il peut arriver que la Régie puisse convoquer le titulaire en audience lorsqu’elle est préoccupée par la protection et à la sécurité du public à l’égard de l’organisation et du déroulement des concours publicitaires, comme ce fut le cas dans la décision 9157-1091 Québec inc., Alarme Cam, décision No 20-0000064, en date du 12 mars 2009.

Les faits sont les suivants : le 6 février 2009, la Régie des alcools, des courses et des jeux (la Régie) recevait un avis de tenue d’un concours publicitaire rempli par M. Dominic Tessier, pour le bénéfice de la compagnie 9157-1091 Québec inc. relativement à la tenue d’un concours publicitaire devant avoir lieu entre le 16 mars 2009 et le 1er décembre 2009 et dont la date de lancement prévue est fixée au 16 mars 2009. Le 27 février 2009, la Régie faisait parvenir à la compagnie 9157-1091 Québec inc un avis de rencontre afin de compléter son analyse concernant cet avis de tenue d’un concours publicitaire. Elle soulevait alors que la Régie avait été informé de plaintes concernant le déroulement des tirages que la compagnie aurait tenus en 2008. Selon les informations reçues, la compagnie aurait induit le public en erreur et aurait chargé des frais de loterie et courses.

La Régie soulève, par la preuve démontrée, que le projet de concours contenait des règlements et autres documents improvisés, contradictoires et confondants. Plus précisément, alors que l’avis de tenue d’un concours publicitaire rempli par la compagnie indique que celui-ci sera lancé le 16 mars 2009, la compagnie admet avoir commencé à distribuer et faire remplir, depuis l’été 2008, de 400 à 500 coupons de participation lesquels, à leur face même, sont erronés et en contradiction avec les règlements du concours. Alors que les règlements du concours spécifient que les coupons doivent être déposés dans « une des boîtes prévues à cet effet », la preuve établit qu’ils sont plutôt remplis dans différents marchés aux puces et sont, au premier chef, utilisés pour des fins de sollicitation téléphonique et à domicile en lien avec la stratégie de promotion (certificats d’hébergement gratuit) de l’entreprise et permettent au passage à la demanderesse de ramasser des frais dits administratifs. Cette façon de faire laisse clairement croire et sous-entendre aux participants que chacun d’entre eux est susceptible, d’une façon ou d’une autre, de gagner un prix, contrevenant ainsi aux règles sur les concours publicitaires.

De plus, alors que les règlements du concours, élaborés à la demande de la compagnie et déposés en preuve, prévoient que celui-ci se déroulera entre le 16 mars 2009 et le 1er décembre 2009 pour un tirage du gagnant le 15 décembre 2009, le prix (le voyage) lui, devra être effectué avant le 15 juin 2009.

Par conséquent, compte tenu des témoignages entendus et de la preuve documentaire analysée, la Régie des alcools, des courses et des jeux est arrivée à la conclusion que la protection du public, dans les circonstances, lui commandait de refuser la demande, soit l’avis de tenue du concours publicitaire déposé par 9157-1091 Québec inc. / Alarme Cam sous le nom « Protégeons nos familles ».

Note de l'auteur: L'information contenue dans cette chronique est générale et ne constitue pas un avis juridique.

mars 01, 2010

La portée de la clause de non-concurrence

La clause de non-concurrence est prévue à l’article 2089 du Code civil du Québec qui stipule que « Les parties peuvent, par écrit et en termes exprès, stipuler que, même après la fin du contrat, le salarié ne pourra faire concurrence à l'employeur ni participer à quelque titre que ce soit à une entreprise qui lui ferait concurrence. Toutefois, cette stipulation doit être limitée, quant au temps, au lieu et au genre de travail, à ce qui est nécessaire pour protéger les intérêts légitimes de l'employeur. Il incombe à l'employeur de prouver que cette stipulation est valide.».

Or, le 11 février 2009, la Cour supérieure, sous la plume de l’Honorable Juge Bellavance dans l’arrêt TQS inc. c. Pelletier, 2009 QCCS 597 est venue en préciser la portée.

Rappelons les faits du litige qui se situe dans le milieu de la télévision de Sherbrooke et des Cantons de l'Est où la concurrence est forte entre TQS et TVA et Radio-Canada. Mme Lucie Pelletier, a été une employée de TQS Estrie, occupant divers postes successifs du 30 octobre 1989 au 15 janvier 2009. Elle avait souscrit un engagement de non-concurrence pour une période de 6 mois. Elle a démissionné le 15 janvier 2009 pour accepter un poste de directrice générale auprès de Groupe TVA inc. TQS a alors demandé l'émission d'une injonction pour faire respecter l'engagement de non-concurrence.

Mme Pelletier avait signé deux contrats de travail. Le premier contenait la clause suivante: « Pour une période de six mois suivant la fin de la cessation de son emploi auprès de TQS inc., l'employé s'engage à ne pas effectuer quelque travail que ce soit ou fournir quelque service que ce soit dans un poste identique ou similaire à celui qu'il occupait chez TQS, et ce, auprès de ou pour le compte de Groupe TVA inc. (réseaux LCN/TVA et autres chaînes actuelles et à venir), de la Société Radio-Canada (Radio-Canada/RDI et autres chaînes actuelles et à venir), le Groupe Astral ou le Groupe Corus et ce, dans le territoire de la province de Québec. »

Or, au cours du printemps 2008, Mme Pelletier a été promue au poste de directrice des ventes locales et du marketing de TQS Estrie, le second contrat de travail intervenu intervenu en date du 22 août 2008 contenait la clause suivante: « Pour une période de six (6) mois suivant la fin de son emploi auprès de l'Employeur, l'Employée s'engage à ne pas effectuer quelque travail que de soit ou fournir quelque service que ce soit, directement ou indirectement, à titre de mandant, agent, représentant, gestionnaire, conseiller, administrateur, consultant, entrepreneur, employeur ou employé, ou à tout autre titre, auprès de ou pour le compte du Groupe TVA Inc. (toutes chaînes, filiales ou sociétés apparentées de télévision et de services de nouveaux médias actuels et à venir, y compris toutes les stations régionales), de la Société Radio Canada (toutes chaînes, filiales ou sociétés apparentées de télévision et de services de nouveaux médias actuels et à venir, y compris toutes les stations régionales), du Groupe Astral (toutes chaînes, filiales ou sociétés apparentées de télévision et de services de nouveaux médias actuels et à venir, y compris toutes les stations régionales), et du Groupe Corus, et ce, dans le territoire de la province de Québec

Le Tribunal a conclu à l'invalidité de la clause de non-concurrence. Mme Pelletier travaille dans ce secteur depuis 25 ans. La clause ne passe pas le test de la nécessité prévu à l'article 2089 C.c.Q. puisqu'on interdit tout travail et mentionne que c’est «carrément exagéré pour protéger les intérêts de l'employeur». Le Tribunal se fonde également sur l'arrêt Shafron c. KRG Insurance Brokers (Western) inc. (2009 CSC 6) récemment rendu par la Cour Suprême du Canada pour conclure que la clause qui prévoit qu'un tribunal peut réduire la portée de la clause de non-concurrence pour la rendre raisonnable est illégale. En effet, les clauses dites de correction, mandatant le Tribunal, au cas où elles seraient excessives, de les épurer pour les rendre acceptables, feraient en sorte la théorie de la divisibilité inciterait les employeurs à rédiger des clauses restrictives d'une portée démesurée en s'attendant à ce que les tribunaux en retranchent les éléments déraisonnables ou en donnent une interprétation atténuée selon ce qu'ils jugent raisonnable. L'injonction fut donc refusée.

Note de l'auteur: L'information contenue dans cette chronique est générale et ne constitue pas un avis juridique.

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