décembre 01, 2005

La fusion d’entreprise démystifiée

L’actualité économique est abondante en matière de fusion d’entreprise. Or, quelle est la réglementation qui encadre les fusions ? Quels sont les aspects qui seront étudiés ?

Encadrement

La Loi sur la concurrence, L.R.C., 1985, ch. C-34 (ci-après « la Loi ») encadre la réglementation générale du commerce en matière de complots, de pratiques commerciales et de fusionnements qui touchent à la concurrence. Selon la définition prévue à l'article 91 de la Loi, un fusionnement est « […] l'acquisition ou l'établissement, par une ou plusieurs personnes, directement ou indirectement, soit par achat ou location d'actions ou d'éléments d'actif, soit par fusion, association d'intérêts ou autrement, du contrôle sur la totalité ou quelque partie d'une entreprise d'un concurrent, d'un fournisseur, d'un client ou d'une autre personne, ou encore d'un intérêt relativement important dans la totalité ou quelque partie d'une telle entreprise. »

Mesure de protection

Comme le prévoit le paragraphe 92(1) de la Loi, le Tribunal de la concurrence (ci-après « le Tribunal » peut rendre une ordonnance lorsqu'il conclut qu'une fusion « empêche ou diminue sensiblement la concurrence ou aura vraisemblablement cet effet ». Un empêchement ou une diminution sensible de la concurrence ne peut résulter que d'une fusion ayant vraisemblablement pour effet de créer, de maintenir ou d'augmenter la capacité de l’entité fusionnée d'exercer, unilatéralement ou en coordination avec d'autres, une plus grande puissance commerciale ou un plus grand pouvoir de marché.

Conséquences du fusionnement

Or, il n’est pas nécessaire qu’une infraction ait été commise par le fusionnement. Seules les conséquences du fusionnement sont retenues comme étant pertinentes et étudiées. En effet, l’arrêt Air Canada c. Canada (Directeur des enquêtes et des recherches), (1993) C.P.R. (3d) 131 (Trib. conc.), confirmé par la Cour d’appel fédérale (1993) 51 C.P.R. (3d) 131 à 142, « Au moment de prononcer une ordonnance, l’objectif principal du Tribunal doit être la protection de l’intérêt du public face à la concurrence et non la préservation d’intérêts contractuels privés. » Si le fusionnement n’a pas eu lieu, l’ordonnance visera à empêcher la diminution substantielle de la concurrence ; si elle a déjà eu lieu, l’ordonnance visera à rétablir un niveau de concurrence sain.

Facteurs analysés

De façon générale, les principaux facteurs retenus dans l'évaluation des effets d'une fusion sur la concurrence sont le prix et la production. Le Bureau de la concurrence évalue également les effets d'une fusion sur d'autres aspects de la concurrence tels que la qualité, le choix des produits, le service, l'innovation et la publicité, en particulier sur les marchés où la concurrence s'exerce principalement par des moyens autres que par les prix.

Marché pertinent et dimension géographique

La première étape de l'examen d'une fusion par le Bureau consiste habituellement à définir le ou les marchés pertinents sur lesquels les parties à la fusion exercent leurs activités afin d'identifier un groupe d'acheteurs qui peuvent éventuellement avoir à faire face à une augmentation du pouvoir de marché à cause de la fusion. Le marché pertinent est défini en fonction de deux aspects : la dimension du produit et la dimension géographique.

Aux fins de la définition du marché du produit, ce n'est pas tant l'identité des vendeurs qui importe, mais les caractéristiques des produits et la capacité ou la volonté des acheteurs de se tourner vers un autre produit pour une part suffisante de leurs achats en conséquence de modifications des prix relatifs. Aussi, afin de définir l'étendue géographique du marché, ce n'est pas tant l'identité des vendeurs qui importe, mais la capacité ou la volonté des acheteurs de s'approvisionner dans un autre endroit pour une part suffisante de leurs achats, par suite d'une variation des prix relatifs. Le marché géographique pertinent est celui qui réunit tous les points d'approvisionnement qui sont perçus comme de proches substituts par les acheteurs.

La localisation géographique des acheteurs et des vendeurs est pertinente à la définition des limites d'un marché, en particulier lorsqu'il s'agit d'un marché local ou régional. Il est supposé qu'une entreprise cherchant à maximiser ses profits choisit une localité en fonction de la densité des acheteurs et de manière à éviter la cannibalisation potentielle des ventes qui peut se produire si elle choisit un emplacement situé à proximité des emplacements de ses autres établissements. Ainsi, la réaction de la demande est encore un élément clé pour déterminer les limites d'un marché. L'analyse de la concurrence au niveau spatial peut aider à préciser les limites de marchés géographiques localisés.

En conclusion, il faut retenir que toute fusion n’est pas nécessaire anti-concurrentielle. Lorsqu'une fusion n'a vraisemblablement pas d'effets négatifs sur le pouvoir de marché, on ne peut généralement pas conclure que la fusion aura vraisemblablement pour effet d'empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence, même si la fusion peut soulever des questions relatives à d'autres objectifs de politique industrielle qui dépasse le cadre de la Loi. Aussi, le commissaire ne contestera généralement pas un fusionnement au motif que les parties au fusionnement seront en mesure d’exercer unilatéralement un plus grand pouvoir de marché qu’en l’absence de fusionnement, lorsque la part de marché de l’entité fusionnée est inférieure à 35% après le fusionnement.

Note de l'auteur: L'information contenue dans cette chronique est générale et ne constitue pas un avis juridique

novembre 01, 2005

Pigistes, à qui appartient l’œuvre réalisée dans le cadre du contrat ?

Lorsque j’ai commencé à rédiger les chroniques La pub et le droit en août 2004, je me suis posé la question suivante : en matière de propriété intellectuelle, à qui appartient l’œuvre réalisée par un travailleur autonome, un pigiste, un contractuel ?

Possession du droit d'auteur

En effet, la Loi sur le droit d’auteur spécifie à l’article 13(3) spécifie que l’employeur est le premier titulaire du droit d’auteur.

« Lorsque l'auteur est employé par une autre personne en vertu d'un contrat de louage de service ou d'apprentissage, et que l'oeuvre est exécutée dans l'exercice de cet emploi, l'employeur est, à moins de stipulation contraire, le premier titulaire du droit d'auteur; mais lorsque l'oeuvre est un article ou une autre contribution, à un journal, à une revue ou à un périodique du même genre, l'auteur, en l'absence de convention contraire, est réputé posséder le droit d'interdire la publication de cette oeuvre ailleurs que dans un journal, une revue ou un périodique semblable »

Mais qu’en est-il lorsque la relation est contractuelle à durée déterminée sans aucun lien de subordination entre 2 personnes moyennant rémunération ? Qui est le propriétaire ? La Loi sur le droit d’auteur précise à l’article 13(1) que l’auteur est le premier titulaire de l’œuvre

« Sous réserve des autres dispositions de la présente loi, l'auteur d'une oeuvre est le premier titulaire du droit d'auteur sur cette œuvre ».

De plus, le titulaire du droit d’auteur est également titulaire des droits moraux. Ce droit moral lui permet d’exiger que son œuvre soit présentée dans son intégralité en interdisant toute modification, mutilation ou déformation qui serait préjudiciable à son honneur ou à sa réputation.


Marque de commerce

La situation se complique également lorsqu’un contrat de service est exécuté dans le cadre de l’utilisation d’une marque de commerce. Pour qu’un mot, un dessin, une forme ou un emballage puissent constituer une marque de commerce, ils ne doivent être employé que par une seule personne pour distinguer ses produits ou services de ceux d’une autre personne. À partir du moment où plusieurs personnes utilisent un mot, une forme ou un emballage pour désigner un service ou un objet, ces derniers perdent leur caractère distinctif et tombent dans le domaine public.

Eléments du contrat

Il est donc essentiel que les parties s’entendent sur ces éléments lors de la formation du contrat, notamment sur le (1) droit d’auteur, ses droits moraux et l’utilisation de la (2) marque de commerce

1. Droit d’auteur et ses droits moraux

Dans un contrat de service, il serait préférable de prévoir par écrit la cession du droit d’auteur, tel que prévu par l’article 13(4) de la Loi sur le droit d’auteur

« Le titulaire du droit d'auteur sur une oeuvre peut céder ce droit, en totalité ou en partie, d'une façon générale ou avec des restrictions relatives au territoire, au support matériel, au secteur du marché ou à la portée de la cession, pour la durée complète ou partielle de la protection; il peut également concéder, par une licence, un intérêt quelconque dans ce droit; mais la cession ou la concession n'est valable que si elle est rédigée par écrit et signée par le titulaire du droit qui en fait l'objet, ou par son agent dûment autorisé ».

De plus, il faut également prévoir la cession des droits moraux, tel que stipulé à l’article 14.1 de la Loi sur le droit d’auteur

« Les droits moraux sont incessibles; ils sont toutefois susceptibles de renonciation, en tout ou en partie »

2. Marque de commerce

À partir du moment où plusieurs personnes utilisent un mot, une forme ou un emballage pour désigner un service ou un objet, ces derniers perdent leur caractère distinctif et tombent dans le domaine public. Afin d’éviter que la marque de commerce perde son caractère distinctif et tombe dans le domaine public, un contrat de licence doit être prévu.Par le contrat de licence, une fiction juridique est créée, à savoir que l'usage de la marque par un licencié est présumé être celui du propriétaire de la marque. La Loi sur les marques de commerce stipule à l’article 50 (1)

« Pour l’application de la présente loi, si une licence d’emploi d’une marque de commerce est octroyée pour un pays, à une entité par le propriétaire de la marque, ou avec son autorisation, et que celui-ci, aux termes de la licence, contrôle, directement ou indirectement, les caractéristiques ou la qualité des marchandises et services, l’emploi, la publicité ou l’exposition de la marque, dans ce pays par cette entité comme marque de commerce, nom commercial — ou partie de ceux-ci — ou autrement ont le même effet et sont réputés avoir toujours eu le même effet que s’il s’agissait de ceux du propriétaire »

Si dans une relation contractuelle, le propriétaire d'une marque de commerce donne mandat à un sous-traitant de fabriquer et de vendre des produits en liaison avec sa marque de commerce, se réservant une redevance payable en fonction des unités vendues uniquement, la marque ne serait donc plus employée par son propriétaire et en absence d'un contrat de licence prévu à l’article 50(1), la marque pourrait perdre son caractère distinctif. Par conséquent, le propriétaire devra exercer un contrôle sur la qualité des produits et services offerts par le licencié, à défaut de telle clause prévue dans le contrat, le contrat de licence pourrait être jugé insuffisant pour protéger le caractère distinctif de sa marque.

En conclusion, la propriété intellectuelle étant un processus complexe, au moment de concevoir les clauses d'un contrat de sous-traitant, il serait préférable de d’inclure certaines dispositions relatives aux droits d'auteur et aux marques de commerce afin de protéger les parties au contrat.

Note de l'auteur: L'information contenue dans cette chronique est générale et ne constitue pas un avis juridique

octobre 01, 2005

Votre clientèle est-elle informée de façon adéquate ?

Vous désirez commercialiser votre nouveau produit. Ce nouveau produit doit cependant être étiqueté avant d’être mis sur le marché. L’étiquette a certes une valeur promotionnelle mais tient aussi le rôle d’informer sur le contenu avec le plus de précisions possible.


En effet, l’étiquette apposée sur un produit ou un emballage constitue un moyen idéal de communication entre vous et le consommateur. L’étiquetage informatif traduit une politique de prévention en faisant peser sur le fabricant, l’importateur et le vendeur un devoir de renseignement destiné à informer le consommateur avant qu’il ne contracte. La législation impose l’obligation de divulguer des mentions essentielles sur les étiquettes et l’emballage et l’interdiction de certaines pratiques ou certaines mentions susceptibles de créer de la confusion dans l’esprit de l’acheteur. Elles interdisent également les informations déloyales et trompeuses. Le présent article limitera cette brève revue aux produits préemballés uniquement, les aliments et drogues, les produits agricoles et les produits textiles étant couverts par des législations qui leur sont propres.

Définition de produit préemballé

Tous les produits de consommation vendus préemballés sont soumis à la Loi sur l’emballage et l’étiquetage des produits de consommation, L.R.C. 1985, c. C-38, ci-après « la Loi ». Un produit préemballé est tout produit conditionné tel qu'il est ordinairement vendu au consommateur, ou utilisé ou acheté par lui dans son contenant d'origine, c’est-à-dire un récipient, emballage ou autre conditionnement contenant un produit mis en vente, excluant les garnitures d'emballage, les conteneurs et tous les conditionnements extérieurs - notamment les boîtes - qui ne servent pas normalement à la présentation au consommateur.

Renseignements obligatoires à inscrire sur l’étiquette

La Loi a pour principal objectif de permettre au consommateur de comparer les produits relativement à la quantité, au prix et autres qualités du produit, de le protéger contre la fraude, la falsification et de prévenir les pertes pécuniaires dues à une information inappropriée, insuffisante ou trompeuse, le fabricant est soumis à des règles qui régissent l’emballage et l’étiquette de tous les produits assujettis afin d’assurer que les renseignements figurant sur l’étiquette ou l’emballage soient complets et exacts.

1- Mentions essentielles

- Identité principale du produit sur la face principale de l’emballage (désigné par son nom commun ou générique ou défini par sa fonction) ;
- Nom et emplacement de l’établissement ainsi que le pays d’origine du fabricant, du conditionneur ou du distributeur ;
- Ingrédients de la composition, par ordre d’importance quantitative décroissante ;
- Date ultime d’utilisation
- Déclaration de quantité nette du produit, exprimée en unité métrique de poids ou de mesures
- Information doit être divulguée en anglais et en français, sont dispensés de cette exigence les produits culturels, notamment les cartes de souhaits, les livres, les jouets parlants et ceux dont le fonctionnement est la langue, les produits locaux, tels des produits fabriqués, transformés ou emballés dans une collectivité et vendus dans cette collectivité, des produits à caractère religieux ou d’usage peu répandu et les produits d’essai.

2- Représentations trompeuses

L'article 7 de la Loi interdit l'information fausse ou trompeuse se rapportant à un produit préemballé. Les renseignements figurant sur un emballage, qu'il s'agisse de symboles ou de mots, ne doivent pas être faux ni induire le consommateur en erreur. On peut citer, à titre d’exemple :

-Information sur la quantité nette : Tout étiquetage qui donne l'impression qu'un emballage contient plus de produits qu'il n'en contient véritablement peut contrevenir à cet article, tels que des illustrations trompeuses, des déclarations qualificatives de nature à qualifier la quantité nette d'un produit, ou une déclaration incorrecte de la quantité nette. En effet, le contenu réel d'un emballage ne doit pas être inférieur, en moyenne, à la quantité nette déclarée.

-Information sur la composition des produits : Toute indication qui induit le consommateur en erreur à l'égard de la composition d'un produit, tels que des substances incluses (l'étiquetage d'un produit ne doit pas déclarer que celui-ci contient une substance qui, en fait, en est absente) ou des substances exclues (l'étiquetage d'un produit ne peut indiquer que celui-ci ne contient pas une substance si, dans les faits, il la contient)
-Autres descriptions ou illustrations trompeuses :Le produit doit être conforme à toute autre indication se rapportant, par exemple, à son genre, sa qualité, sa tenue à l'usage, sa fonction, son origine ou son mode de fabrication.

Sanctions
Les sanctions consistent à une peine d’amende, la saisie et la confiscation des biens étiquetés de façon irrégulière. Cependant, la défense de diligence raisonnable est recevable. La personne accusée peut se disculper en prouvant que la perpétration a eu lieu à son insu ou sans son consentement et qu'il avait pris les mesures nécessaires pour l'empêcher.

En conclusion, nous pourrions souligner les limites de la politique d’étiquetage dans un contexte de mondialisation. En effet, le problème de la langue d’étiquetage sera-t-il une entrave artificielle aux échanges commerciaux ? À ce sujet, l’exemple de la Communauté économique européenne s’avère pertinent. La législation de chaque pays exige que l’information fournie au consommateur soit rédigée dans une langue facilement compréhensible pour les personnes auxquelles elle est destinée, notamment par l’adoption éventuelle d’un système de symboles.

De plus, la Loi prévoit que le ministre peut effectuer des recherches en matière d'emballage et d'étiquetage de produits préemballés, y compris en ce qui concerne le marquage du prix unitaire, de la date et de l'entreposage ainsi que les formes et formats des contenants. Or, en raison des changements constants dans les prix, il est difficilement envisageable d’exiger l’inscription de la mention sur l’emballage par le fabricant ou le distributeur. Elle devrait plutôt être faite aux points de vente et l’obligation reposerait alors sur le vendeur. Finalement, certains s’objectent à cette pratique du fait que la comparaison ne tient pas compte de la qualité du produit et craignent que l’indication du prix unitaire minimise l’importance des différences de qualités.

Note de l'auteur: L'information contenue dans cette chronique est générale et ne constitue pas un avis juridique

septembre 01, 2005

Devez-vous breveter vos produits ?

Vous songez à lancer un nouveau produit au concept révolutionnaire. Êtes-vous à l’abri de la concurrence ? De quelle protection bénéficiez-vous ? Quels sont vos recours ?

Il est dans votre intérêt de bien connaître la protection offerte par les brevets, que vous vous employiez à développer des technologies de pointes ou à apporter des améliorations à des produits. Régis par la Loi sur les brevets, L.R.C. 1985, c. P-4, ci-après « Loi sur les brevets », les brevets d’inventions sont des droits de propriété intellectuelle et dans la mesure où ils sont applicables, ces droits donnent de réelles protections aux créations de l’entreprise.

Définition de la notion de brevet

Tout procédé de fabrication, machinerie, produit ou composition de machine qui possède les critères de nouveauté, d’utilité et non évidence (l’ingéniosité) peut constituer un brevet, à l’exception du principe scientifique ou de l’idée abstraite qui ne peuvent être brevetés tout comme l’invention connue du public avant la date du dépôt de la demande du brevet. Dans ce dernier cas, notons qu’une exception existe si le demandeur est lui-même ou par personnes interposées à l’origine de la divulgation publique de l’invention. De plus, la divulgation doit avoir eu lieu dans l’année précédant la demande. Si ces conditions sont rencontrées, l’invention est brevetable malgré sa divulgation publique. Notons également que les schémas, les plans, les méthodes d’affaires, les programmes d’ordinateurs ainsi que les traitements médicaux ne peuvent être brevetés.

En vertu de la Loi sur les brevets, l’inventeur n’a pas un droit de propriété exclusif sur son invention. En effet, il doit déposer une demande de brevets pour l’obtenir. De plus, l’invention et son fonctionnement doivent être complètement et clairement dans la demande déposée sous peine d’invalider le brevet. En principe, le brevet est accordé à la première personne qui dépose une demande concernant l’invention visée. Il est cependant préférable de retenir les services d’un agent de brevets qui a l'habitude de préparer des demandes et qui connaît parfaitement le processus complexe relatif aux brevets.

La protection de votre brevet

Le brevet donne à son titulaire le monopole d’exploitation pour 20 ans à partir de la date du dépôt de la demande du brevet et le titulaire, en principe, est le seul au Canada à pouvoir fabriquer, utiliser et commercialiser l’invention brevetée. Le brevet a une durée de 20 ans et n’est pas renouvelable. Après 20 ans, votre invention tombe dans le domaine public et peut être exploitée par n’importe qui. Plusieurs options s’offrent alors à vous.

Vous pouvez conserver votre brevet mais permettre à un ou plusieurs tiers de jouir de droits qui s’y rattachent en leur accordant une licence de brevet, soit l’autorisation donnée à une entreprise ou à une personne de fabriquer ou de vendre une invention moyennant redevances, spécifiant par exemple le territoire couvert, la redevance prévue pour chaque copie fabriquée.

Vous pouvez également céder votre brevet à un tiers, soit lui vendre votre monopole d’exploitation de l’invention. Cependant, après la cession, vous n’avez plus aucun droit de propriété sur l’invention, seul l’acquéreur peut l’exploiter.

Veuillez prendre note qu’en cas de violation par un tiers des droits exclusifs accordés par le brevet, il vous appartient de prendre les actions nécessaires pour faire respecter vos droits. Vous pouvez alors poursuivre le tiers pour contrefaçon qui aurait fabriquer, acheter ou utiliser votre invention brevetée, sans votre autorisation, lui réclamer des dommages-intérêts pour les pertes subies et obtenir une injonction pour faire cesser la contrefaçon.

L’avantage du brevet

Le brevet comporte de nombreux avantages. Il permet de faire respecter vos droits exclusifs. De plus, il freine la concurrence et vous permet d’augmenter vos parts de marché et vos marges bénéficiaires. Il accroît votre notoriété et améliore votre solvabilité par sa valeur monétaire. Son potentiel favorise également les transactions commerciales de votre entreprise.

En conclusion, en déposant une demande de brevet, vous vous engagez à fournir au gouvernement une description détaillée de votre invention en échange d’une éventuelle protection conférée par le brevet. Or, afin d’enrichir l’ensemble des connaissances techniques au niveau mondial, les détails inclus dans les demandes de brevets faites au Canada sont rendus publics après une période de confidentialité de 18 mois.

Ainsi, les brevets assurent non seulement une protection au titulaire mais fournissent également des renseignements précieux en permettant de cerner les tendances et l’évolution de la technologie, en favorisant la découverte de nouveaux produits, en limitant les répétitions, en donnant un aperçu de la concurrence et en favorisant la solution de problèmes techniques.

Note de l'auteur: L'information contenue dans cette chronique est générale et ne constitue pas un avis juridique

août 01, 2005

Votre secret commercial est-il protégé ?

Vous êtes propriétaire d’une entreprise. Vous lui souhaitez longue vie en espérant que votre secret commercial ou toute autre information à caractère confidentiel sera à l’abri des concurrents. Or, la mobilité de votre personnel entraîne le risque que cette information soit un jour révélée. Peut-on protéger votre entreprise ?


Tout d’abord définissons la nature du secret commercial. Ce dernier est défini comme étant un renseignement confidentiel utilisé par une entreprise qui confère un avantage concurrentiel, et qui peut être gardé secret. Cette information n’est généralement pas divulguée au public. Elle peut comprendre l’information relative au produit, soit la ou les formule(s),le motif, le dispositif, le composé, le procédé ou l’information relative à l’entreprise, soit les listes de clients, les listes de fournisseurs, les prix, les plans d’affaires. Elle revêt donc une certaine valeur que l’entreprise peut vouloir protéger.

La protection du secret commercial et sa durée

Le secret commercial ne bénéficie pas de protection statutaire. Il n'existe pas de législation particulière sur le sujet et il faut s'en remettre au droit civil et commercial prévu au Québec par le Code civil du Québec.

Le silence est alors sa seule forme de protection. On peut encadrer alors le silence par une obligation de discrétion. Le Code civil du Québec stipule que l’employé doit agir avec loyauté et ne pas faire usage de l’information à caractère confidentiel qu’il obtient dans le cadre de son travail. Cette obligation survit durant un délai à durée raisonnable après la cessation de son travail. Cette obligation de loyauté est également requise pour les administrateurs, les dirigeants et autres représentants qui sont mandataires de l’entreprise. La divulgation à des tiers peut être requise pour des fins de commercialisation, il faut alors prévoir une entente de confidentialité. Les droits de divulgation et d’utilisation sont alors créés par contrat ou par la relation de confiance établie entre les parties. Les contrats d'emploi (ainsi que ceux d'approvisionnement) devraient donc comporter une clause spécifique de confidentialité.


La durée de la protection est illimitée, en autant que la confidentialité est maintenue, ce qui représente la différence entre le brevet et le secret commercial.

Les recours en cas de divulgation

Qu’arrive-t-il alors si votre secret commercial est divulgué ? Tout d’abord, précisons qu’il n’y a aucune responsabilité au Québec lorsque la divulgation est nécessaire pour la sécurité du public. En effet, il existe certaines situations dans lesquelles la divulgation des secrets commerciaux n'aura pas pour effet d'entraîner la responsabilité de l'employé. Selon le Code civil, toute personne peut se dégager de sa responsabilité pour le préjudice causé à autrui par suite de la divulgation d'un secret commercial si elle prouve que l'intérêt général l'emportait sur le maintien du secret et, notamment, que la divulgation de celui-ci était justifiée par des motifs liés à la santé ou à la sécurité du public, en vertu de l’article 1472 du Code civil du Québec:


« Toute personne peut se dégager de sa responsabilité pour le préjudice
causé à autrui par suite de la divulgation d'un secret commercial si elle
prouve que l'intérêt général l'emportait sur le maintien du secret et,
notamment, que la divulgation de celui-ci était justifiée par des motifs
liés à la santé ou à la sécurité du public
»



Or, qu’en est-il si la sécurité du public n’est pas en jeu ? Si la partie qui reçoit l’information sait que cette dernière représente un secret commercial, le tribunal peut prononcer une injonction pour empêcher la partie d’utiliser l’information. Or si l’information est révélée, quels seront vos recours ?

En théorie, les dommages et leur indemnisation pour la divulgation d'un secret de commerce sont prévus au Code civil du Québec, à l’article 1612:

« En matière de secret commercial, la perte que subit le propriétaire du
secret comprend le coût des investissements faits pour son acquisition,
sa mise au point et son exploitation; le gain dont il est privé peut être
indemnisé sous forme de redevances
»


En pratique, les dommages intérêts sont difficiles à obtenir. En effet, la jurisprudence nous apprend qu’il faut démontrer l'intérêt d'une partie à la protection de secrets commerciaux, le caractère confidentiel de l’information détenue et l’avantage commercial qu’elle peut retirer personnellement de cette information. De plus, la protection du secret reposant sur la procédure complexe du common law ou du Code civil du Québec, il faut prouver qu’il y a eu abus de confiance

En conclusion, même si le Code civil du Québec prévoit la protection des informations à caractère confidentiel, il demeure préférable que vous songiez à prévoir vos propres clauses de protection, en limitant l’accès à l’information entreposée dans un endroit sûr. De plus, toute licence du secret commercial devrait comporter une clause de confidentialité et de non-divulgation. Et finalement, en rédigeant les clauses du contrat de travail portant sur la confidentialité, la non concurrence et le partage des droits sur la propriété intellectuelle qui sont assujetties au droit commun du Québec tel que contenu au Code civil afin de déterminer la validité de l'ensemble du contrat ou des clauses le constituant en stipulant explicitement quelle sera la durée.

Note de l'auteur: L'information contenue dans cette chronique est générale et ne constitue pas un avis juridique

juillet 01, 2005

La confusion des marques de commerce

Le 10 mai 2005, la Cour d'appel fédérale a rendu une décision qui apporte des précisions sur l'interprétation de l'alinéa 37(1)c) de la Loi sur les marques de commerce, L.R. 1985, ch. T-13, (ci-après « la Loi »), dans l’arrêt Procureur général du Canada c. Effigi Inc., 2005 CAF 172. La Cour a jugé que le registraire des marques de commerce ne devait pas tenir compte des dates de premier emploi ou de révélation lorsqu'il examine le droit à l'enregistrement des requérants.

En conséquence, le registraire ne tiendra plus compte des dates de premier emploi ou de révélation, en tant que facteur pertinent en vertu de l'alinéa 37(1)c) de la Loi, au cours du processus d'examen. Ainsi, lorsque des marques en instance créent de la confusion, le requérant dont la demande porte une date de dépôt ou de priorité antérieure sera considéré comme étant la personne ayant droit à l'enregistrement de la marque de commerce.

Or, quels sont les éléments d'appréciation pour juger si la marque de commerce crée ou non une confusion avec une autre ?

Éléments d'appréciation

L’article 6 (5) de la Loi apporte les précision suivantes, soit « En décidant si des marques de commerce ou des noms commerciaux créent de la confusion, le tribunal ou le registraire, selon le cas, tient compte de toutes les circonstances de l'espèce, y compris :

a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou noms commerciaux, et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus;
b) la période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage;
c) le genre de marchandises, services ou entreprises;
d) la nature du commerce;
e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'ils suggèrent. »

Le Manuel d’examen des marques de commerce publié en septembre 1996 par l’Office de la propriété intellectuelle du Canada (OPIC) apporte plus de précisions quant à la confusion. Pour déterminer s'il y a confusion, il faut se fier à sa première impression. Les consommateurs peuvent connaître la marque de commerce, mais une réminiscence imparfaite peut cependant les amener à prendre une marque pour une autre. L'examinateur doit se mettre à la place des consommateurs et se demander si une personne qui a une réminiscence imparfaite serait portée à penser que les marchandises ou les services qui portent la marque de commerce du requérant et celles qui sont associées à la marque déposée sont fabriqués, vendus, donnés à bail, loués ou exécutés par la même personne. Chaque demande doit être examinée sous l'angle de la confusion, qu'il s'agisse d'une marque de commerce ordinaire, d'une marque projetée, d'une marque de certification ou d'un signe distinctif.

La position des tribunaux abonde dans le même sens. Dans l’arrêt l'affaire British Drug Houses Ltd. v. Battle Pharmaceuticals (1944), 4 C.P.R. 48, le Tribunal a conclu que [Traduction] « pour déterminer s'il faut radier une marque de commerce parce qu'elle ressemble à une autre qui est déjà déposée en liaison avec des produits semblables, il ne faut pas comparer les deux marques, une à côté de l'autre, en vue de relever les différences. Elles ne doivent pas être analysées méthodiquement, mais le juge doit plutôt se mettre à la place de
quelqu'un qui se souvient de façon générale et imprécise d'une marque qu'il a déjà vue et qui en voit une autre toute seule plus tard. Si cette personne risque de penser que les produits de la seconde marque viennent des mêmes fabricants que ceux dont elle se souvient vaguement, le tribunal peut alors conclure que ce sont des marques semblables […].On doit plutôt s'attacher à l'effet que produira cette dernière marque sur les vendeurs et les usagers ordinaires, compte tenu du fait que les gens en général se souviennent vaguement d'une chose plutôt que d'en avoir un souvenir précis.
»

De plus, dans l’arrêt Canadian Schenley Distilleries Ltd. c. Canada's Manitoba Distillery Ltd. (1975), 25 C.P.R. (2e éd.) 1, le juge Cattanach a déclaré que « lorsqu'il s'agit de dire si deux marques de commerce peuvent être confondues, il faut prendre en considération les personnes qui achèteront vraisemblablement les marchandises, c'est-à-dire les personnes qui forment habituellement le marché, à savoir les consommateurs. Il ne s'agit pas de l'acheteur impulsif, négligent ou distrait ni de la personne très instruite ni d'un expert. On cherche à savoir si une personne moyenne, d'intelligence ordinaire, agissant avec la prudence normale peut être trompée. Le registraire des marques de commerce ou le juge doit évaluer les attitudes et les réactions normales de telles personnes afin de mesurer la possibilité de confusion. Une jurisprudence constante a établi que la technique appropriée pour l'étude de marques de commerce semblables ne consistait pas à les placer côte à côte et à analyser d'un oeil critique leurs ressemblances et leurs différences, mais bien à trancher la question dans l'ensemble au premier abord ».

Si votre marque de commerce est susceptible de subir une confusion avec le dépôt d’une marque de commerce similaire, quels sont vos recours ?

Recours

En conclusion, toute personne peut, dans le délai de deux mois à compter de l'annonce de la demande, et sur paiement du droit prescrit, produire au bureau du registraire une déclaration d'opposition. Toute personne peut, dans le délai de deux mois à compter de l'annonce de la demande, et sur paiement du droit prescrit, produire au bureau du registraire une déclaration d'opposition indiquant les motifs de l'opposition, avec détails suffisants pour permettre au requérant d'y répondre. Si le registraire estime que l'opposition ne soulève pas une question sérieuse pour décision, la déclaration est rejetée. Notons qu’un appel de toute décision rendue par le registraire, sous le régime de la présente loi, peut être interjeté à la Cour fédérale dans les deux mois qui suivent la date où le registraire a expédié l'avis de la décision.

Note de l'auteur: L'information contenue dans cette chronique est générale et ne constitue pas un avis juridique

juin 01, 2005

L’arrêt Société Veuve Clicquot Ponsardin : La marque de commerce est-elle suffisamment protégée ?

En principe, l'enregistrement des marques de commerce donne des droits au propriétaire d'exclusivité sur les mots, symboles et dessins (ou une combinaison de ces éléments) qui distinguent ses produits ou services de ceux d'autres personnes. Sa marque de commerce peut faire l'objet d'un enregistrement au Canada par l'entremise du Bureau des marques de commerce de l'OPIC. L'enregistrement lui assure alors la protection de la marque au Canada pour une période de 15 ans, renouvelable.

Sauf pour les métaux précieux, il n'est pas obligatoire d'enregistrer une marque de commerce. Le simple emploi de la marque lui confère certains droits à l'égard de celle-ci. Toutefois, l'enregistrement lui confère des droits exclusifs à l'échelle du Canada et lui permet plus facilement d'empêcher un contrefacteur éventuel d'utiliser sa marque de commerce. Les marques de commerce finissent par représenter non seulement les marchandises et les services eux-mêmes, mais aussi la réputation du producteur.

Cependant, en pratique, la réalité est tout autre. Dans litige opposant la Société Veuve Clicquot Ponsardin aux Boutiques Cliquot, on soulève la notion d’élasticité de la marque de commerce. La protection de la marque de commerce se limite aux activités principales de la Société Veuve Clicquot Ponsardin et ne s’étend pas aux articles promotionnels utilisés par celle-ci.

La Loi sur les marques de commerce (ci-après «La Loi») souligne les éléments où des marques de commerce ou des noms commerciaux créent de la confusion. Le caractère distinctif d’une marque et la mesure dans laquelle est elle est connue est mentionnée. Cependant, la marque Veuve Clicquot, bien que célèbre et unique n’a pas mérité une portée de protection étendue en vertu de la loi. En effet, la célébrité à elle seule ne protège pas la marque de commerce de façon absolue. Ce facteur doit être apprécié en liaison avec tous les autres. Le facteur déterminant repose plutôt sur la différence considérable entre le genre de marchandises et la nature du commerce entre les parties.

La protection à l’encontre de la commercialisation trompeuse est liée à la notoriété acquise par l’usage d’un nom, d’une marque ou d’un produit relié à l’achalandage bien établi sur le marché. Encore faut-il que la dépréciation de l’achalandage prévue par la Loi soit associée au même genre d’activité. La Loi prévoit également une protection contre le délit de substitution, soit une forme de représentation trompeuse en vertu de laquelle un commerçant profite gratuitement de l'achalandage d'une autre personne en prétendant que ses produits, ses services ou son entreprise sont ceux de cette autre personne. (MacDonald c. Vapor Canada Ltd., [1977] 2 R.C.S. 134). Cependant, pour réussir une action en délit de substitution, la demanderesse doit établir trois éléments: l'existence d'un achalandage, la représentation trompeuse induisant le public en erreur, et des dommages actuels ou possibles pour la demanderesse.

Finalement, pour qu’il y ait confusion, il faut que le consommateur soit capable de faire une association entre les parties pour que la diminution de la valeur de l’achalandage relié à la marque de commerce ait lieu.

La célèbre Veuve Clicquot n’a pas eu gain de cause devant la Cour fédérale du Canada (2003 CFPI 103), ni devant la Cour d’appel fédérale (2004 CAF 164) à l’encontre de la défenderesse, les Boutiques Cliquot Ltée, à cause de l’héritage laissé par l’arrêt Pink Panther Beauty Corp. c. United Artists Corp. , (1998 3 C.F.534) rendu par la Cour d’appel fédérale et qui est interprété comme empêchant de conclure à la confusion entre marques de commerce « lorsqu’une marque de commerce célèbre est adoptée par un commerçant et appliquée à un secteur d’activité différent du secteur où marque célèbre est reconnue ».

Le litige opposant la société Veuve Clicquot Ponsardin aux Boutiques Cliquot soulève la question de la protection que le Canada est appelé à reconnaître aux marques célèbres sur son territoire et intéresse non seulement les propriétaires de marques célèbres mais également les consommateurs canadiens qui sont en droit à ne pas être trompés relativement à la source des produits et services associés aux marques célèbres.

Note de l'auteur: L'information contenue dans cette chronique est générale et ne constitue pas un avis juridique

mai 01, 2005

Les concours publicitaires et la loi

Vous désirez accroître la notoriété de votre produit. Vous croyez qu’un concours vous simplifiera la vie ? Le législateur, tant fédéral que provincial, a décidé de simplifier celle des consommateurs en réglementant les jeux et concours publicitaires.


Notion de concours publicitaire

En effet, partant du fait qu’un « un concours, un système de loterie, un jeu, un plan ou une opération dont le résultat est l'attribution d'un prix et dont le but est de promouvoir les intérêts commerciaux d'une personne au bénéfice de laquelle il est tenu », un concours publicitaire est lancé dans le public lorsqu'une réclame de ce concours est diffusée dans le public pour la première fois, et ce, quel que soit le média utilisé .

Encadrement législatif

Le Code criminel interdit les loteries et les jeux de hasard incluant les éléments suivants, soit (1) l’espérance d’un gain, (2) la détermination du gagnant au hasard, et (3) le versement d’une considération par le participant. Cependant, les provinces ont le droit d’exploiter les loteries et les jeux de hasard .

Aussi, pour contourner les limites imposées par le Code criminel, lorsque les concours publicitaires imposent aux participants l’envoi d’une étiquette de produit que l’on pourrait qualifier de considération (3), il faut accorder au consommateur l’option d’envoyer un fac-similé. On exige également que le participant réponde à une question faisant appel à ses connaissances ou son habileté afin d’éliminer l’élément hasard (2).

Droits à payer

La Régie des loteries et courses du Québec, responsable de l’administration, la conduite et le fonctionnement des concours publicitaires organisés dans la province, exige des droits à payer si le montant des prix offerts dépasse 100$, notamment

I) 10% de la valeur d'un prix offert à des participants du Québec exclusivement ;
II) 3% de la valeur d'un prix offert à un ensemble de participants du Canada exclusivement, lorsque cet ensemble comprend des participants du Québec ;
III) 0.5% de la valeur d'un prix offert à tout autre ensemble de participants comprenant des participants du Québec.

Conditions de participation et modalités d’obtention du prix divulguées lors d'un concours

La Loi sur la protection du consommateur exige que le commerçant divulgue clairement toutes les conditions et modalités d'obtention du prix d’in concours, d’un tirage dans les quelles un cadeau ou un prix est offert. Le consommateur doit connaître à l’avance la valeur des prix, les moyens de participer, la façon dont les prix sont attribués et la nature de l'épreuve à laquelle doit se soumettre un gagnant pour obtenir son prix. Plus précisément, les règlements d'un concours publicitaire doivent être accessibles au public et comprendre :

- les conditions de participation au concours ;
- les endroits où le public doit déposer ou faire parvenir les bulletins de participation au concours ;
- la date et l'heure limites de participation au concours ;
- la description de la méthode d'attribution des prix, leur nombre, leur description détaillée et la valeur de chacun d'eux ;
- le lieu, la date et l'heure précise de la désignation du gagnant du prix ;
- la mention du média utilisé pour aviser les gagnants du prix gagné ;
- l'endroit, la date et l'heure limites où les prix doivent être réclamés ou, selon le cas, le fait que les prix sont expédiés aux gagnants ;
- la mention que les gagnants seront sélectionnés par un jury, si c'est le cas ;
- la mention du texte suivant: «Un différend quant à l'organisation ou à la conduite d'un concours publicitaire peut être soumis à la Régie des alcools, des courses et des jeux afin qu'il soit tranché. Un différend quant à l'attribution d'un prix peut être soumis à la Régie uniquement aux fins d'une intervention pour tenter de le régler»;

Sanctions

Le fabricant, le commerçant ou le publicitaire ont donc le devoir de divulguer toutes les conditions de participation et d’attribution des prix. Le défaut de se conformer à ces exigences constitue une infraction pénale en vertu de la Loi sur la protection du consommateur. De plus, le Bureau de la concurrence peut obtenir l’ordonnance contre la personne qui organise un concours, une loterie ou un jeu de hasard sans divulguer convenablement et loyalement tout fait modifiant d’une façon importante les chances de gain ou lorsque la distribution des prix est indûment retardée ou lorsque les choix des participants ou la distribution des prix ne sera pas faite en fonction du hasard.

Note de l'auteur: L'information contenue dans cette chronique est générale et ne constitue pas un avis juridique

avril 01, 2005

La Loi sur la protection du consommateur est-elle désuète ?

De nombreux débats sont présentement en cours concernant la réforme du droit québécois de la consommation et rassemblent les acteurs des mondes politique, économique, associatif, judiciaire et universitaire intéressés par la révision et l’actualisation de la Loi sur la protection du consommateur adoptée en décembre 1978. Cette réforme a déjà eu lieu au Brésil, en France et dans plusieurs autres pays européens. Nous vivons une étape importante concernant les rapports consommateur-entreprise.

Plusieurs phénomènes sont apparus depuis son adoption en 1978, notamment, la mondialisation des échanges commerciaux et l’apparition des contrats transfrontaliers, le développement technologique favorisant l’arrivée sur le marché de nouveaux produits et services, les nouvelles formes de publicité, l’endettement de plus en plus élevé des consommateurs, leurs considérations éthiques et gouvernementales et finalement leur manque de cohérence de l’appareil gouvernemental. Plusieurs organismes rattachés à des ministères différents sont responsables de la protection du consommateur. Nous retrouvons 5 domaines de protection (Protection contractuelle, protection financière, protection de la vie privée, qualité/sécurité, contrôle des prix), plus d’une vingtaine de lois et un quinzaine de ministères et d’organismes.

La réforme permettrait à la Loi sur la protection du consommateur d’être codifiée et devenir ainsi une branche spécifique du droit. De plus, l’actualisation du droit de la consommation permettrait également de considérer les enjeux et les effets liés à la mondialisation des échanges économiques au niveau international. En effet, l’internationalisation des échanges a donné lieu à une position de déséquilibre du consommateur, relativement à l’accès à l’information propre aux produits importants (messages publicitaires internationaux, adaptation linguistique relative à l’étiquetage) ainsi qu’à l’accès à la justice pour le règlement des litiges transfrontaliers et les règles de droit international privé qui s’appliquent.

Aussi, la mondialisation permet l’émergence de nouveaux marchés (notamment la Chine, l’Inde et le Brésil) et oblige à réagir sur son impact aux plans social (éthique aux producteurs) et environnemental (pollution, protection des ressources naturelles). De plus, le législateur devrait envisager l’impact de la mondialisation sur la sécurité des produits qui franchissent nos frontières, notamment l’obligation de commercialiser que des produits surs et imposer un suivi des produits, l’information au public et le retrait des produits.

De plus, il faut également redéfinir la nature même du contrat. Tout en maintenant l’interprétation du contrat en faveur du consommateur, il faut imposer une certaine transparence du contrat et une sanction des lésions basées sur l’obligation excessive, voire abusive pour le consommateur. Il faut également un meilleur encadrement juridique pour les contrats conclus par internet, notamment au niveau de l’information précontractuelle disponible sur le site internet du commerçant, de l’identité du commerçant devant être clairement définie, de l’assurance pour le consommateur de pouvoir payer que sur livraison du produit et de la protection du titulaire dune carte de crédit en cas de fraude (achat de produits non livrés, produits défectueux)

Ainsi, tout porte à croire qu’une réforme de la Loi sur la protection du consommateur s’avère nécessaire, soit. Mais sous quelle forme ? Si plusieurs s’entendent pour la codifier et en faire désormais un Code de la consommation, il faut également s’interroger sur son contenu. Cette réforme a déjà eu lieu au Brésil, en France et dans plusieurs autres pays européens et permet d’envisager la forme qu’elle prendrait au Québec.

La codification de la Loi sur la protection du consommateur, si elle s’apparente à celle qu’ont connu le Brésil et la France, pourrait couvrir alors les champs suivants, soit :

L’obligation précontractuelle de renseignement ;
La sécurité alimentaire ;
Le commerce électronique ;
Le surendettement ;
La garantie des vices cachés ;
Le recours collectif des consommateurs.

Cependant, cette réforme, bien que nécessaire, a également ses détracteurs. En effet, la mondialisation et la multiplication des accords commerciaux rendent compliquée toute entente et uniformisation d’un code de la consommation. Il existe également une pression du pouvoir politique qui souhaite des règles plus libérales ainsi qu’un éternel scepticisme face au caractère du droit de la consommation.

Note de l'auteur: L'information contenue dans cette chronique est générale et ne constitue pas un avis juridique

mars 01, 2005

Avez-vous le droit de concurrencer votre ancien employeur ?

Vous possédez une solide expérience et avez développé une expertise appréciable qui vous motive à voler de vos propres ailes en affaires. Vous poussez l’audace jusqu’à concurrencer directement votre ancien employeur. En avez-vous le droit ?

La clause de non concurrence

Tout récemment, l’arrêt LXB communication marketing inc. c. Brien,[1] soulignait les limites à respecter dans l’industrie de la publicité en matière de non concurrence. Le Dictionnaire de droit québécois et canadien définit la clause de non concurrence comme étant une « clause d’un contrat par laquelle une des parties s’interdit, pour un temps et un lieu déterminés, d’exercer une activité professionnelle ou commerciale susceptible de faire concurrence à celle-ci » . Ces trois critères de légitimité de l’étendue des activités prohibées, de la portée territoriale de la prohibition et de la durée de celle-ci sont maintenant codifiés au deuxième alinéa de l’article 2089 du Code civil du Québec (C.c.Q.). Leur validité est reconnue, quoique l'on impose certaines exigences: ces clauses doivent être formulées par écrit, en termes exprès, et être circonscrites, tant dans leur domaine que dans leur portée géographique et temporelle, à ce qui est nécessaire pour protéger les intérêts légitimes de l'employeur. Après une cessation d’emploi, une personne est libre de concurrencer directement avec son ancien employeur s’il n’existe aucune clause de non concurrence entre les parties. L’employé ne doit toute fois pas violer son obligation d’agir de bonne foi. De plus, il doit éviter les tactiques déloyales ou l’utilisation illégale d’informations confidentielles.

Les tactiques déloyales

Un auteur français[2] énumérait les actes que les tribunaux ont considéré comme déloyaux après la fin de l’emploi : i) obtenir la liste des clients par l’entremise d’employés toujours à l’emploi de la compagnie, ii) révéler les affaires de son ancien employeur et iii) se faire engager uniquement pour apprendre qui sont les clients de l’employeur et partir avec ses employés.

Peut-on alors profiter de l’expertise acquise chez l’ancien employeur sans lui faire concurrence ? L’arrêt Lange Canada Inc. c. Platt[3], le tribunal décida qu’un employé ne violait aucune obligation implicite lorsqu’il utilisa chez un nouvel employeur les connaissances générales acquises chez le précédent, eu égard à l’organisation et aux pratiques commerciales, considérant l’intérêt tout aussi légitime du salarié de conserver une capacité de gain.

Cependant, la jurisprudence[4] souligne que la sollicitation directe d’employés d’un ancien employeur peut, suivant les circonstances, constituer de la concurrence déloyale. Dans le même ordre d’idée, la jurisprudence[5] mentionne également que les clients n’étant pas la propriété de ceux qui ils requièrent les services, le recrutement des clients d’un ex-employeur ne constitue pas en soi une opération illégale ou déloyale, mais tout est dans la manière. Les clients étant libres de leur choix, on ne peut, par injonction, interdire à un ancien employé de rendre des services à des clients de son employeur qui ont fait appel à ses services, sans qu’il y ait eu sollicitation de sa part. Les actes de concurrence déloyale sont la sollicitation directe, ciblée et active (appels téléphoniques, lettres, rencontres) et la subtilisation de la liste des clients de l’entreprise. Le salarié qui a quitté son emploi sans être lié par une clause de non concurrence a le droit de faire valoir sa compétence, son expérience et ses connaissances. Conséquemment, il ne peut chercher à s’approprier la clientèle de son ancien employeur que par les moyens généraux de sollicitation, tels radio, télévision, journaux.

Que peut contenir la clause de non concurrence ? L’interdiction d’un employé d’exercer une activité commerciale susceptible de nuire concurrence à celle de son ancien employeur pour un temps et un lieu déterminés.

Le délai raisonnable après la cessation du contrat

En l’absence d’une clause de non concurrence, la durée de l’obligation de loyauté se calcule à compter de la cessation de contrat peut varier, selon la jurisprudence[6] allant d’une période de quatre à douze mois.

La clause de non concurrence limitée quant au lieu

La délimitation géographique doit être raisonnable. La restriction géographique de la concurrence ne doit pas dépasser celle nécessaire à la protection de l'intérêt de l'employeur, et ne dépasse sans doute pas la zone d'opération de l'ancien employé.

En conclusion, même sans les dispositions contractuelles de protection décrites dans le présent article, les employés ont à l'égard de leurs employeurs, en vertu de la common law, une obligation de confidentialité, de loyauté et de bonne foi qui, dans le cas d'employés cadres, équivaut à une obligation fiduciaire. Au Québec, le droit civil fait plutôt référence à l’obligation générale de loyauté et au principe selon lequel plus le poste est important, plus les responsabilités sont lourdes. En effet, le devoir exige d’un employé une éthique prononcée, tant son travail que dans sa conduite personnelle.

Par ailleurs, l’article 2095 C.c.Q souligne le caractère réciproque de l’obligation de bonne foi : l’employeur ne pourra « se prévaloir d’une stipulation de non concurrence s’il a résilié le contrat sans motif sérieux ou s’il a lui-même donné un tel motif de résiliation ».

Enfin, les règles d’équité et de bonne foi s’appliqueront, aux termes de l’article 2091 C.c.Q. en matière de rupture de contrat de travail à durée indéterminée. Ainsi, on ne pourra mettre fin à ce contrat que moyennant un délai de congé raisonnable eu égard aux circonstances particulières et à la durée du contrat. Cette disposition vient confirmer le principe plus général énoncé à l’article 1375 C.c.Q. selon lequel la bonne foi doit gouverner la conduite des parties même lors de l’extinction de l’obligation.

[1][2003] J.Q. no 2646 (C.S.)
[2] Droit civil du contrat de louage, Baudry-Lacantinière – Wahl, 3e éd. Tomme 2, pp. 41-52.
[3] [1973] C.A 1068
[4] Groupe Québécor Inc. c. Grégoire, J.E. 86-760 (C.S.); Marque d’or Inc. c. Clayman, [1988] R.J.Q. 706 (C.S.); Voyages Routair inc. c. Hanna, J.E. (C.S.), D.T.E. 94T-690 (C.S.)
[5] Imprimerie d’Arthabaska inc. c. Roux, J.E. 96-1666 (C.S.); Rose c. Denis, [2002] R.J.Q. 797 (C.Q.)
[6] Johnson & Higgins Willis Faber Ltée c. Picard, [1989] R.J.Q. 24 (C.A.); Dion DeGagné et Associés inc. c Marchand, J.E. 92-1783 (C.S.), D.T.E. 92T-1352 (C.S.) ; Gestion D. Betrand & Fils Inc. c. 9008-3122 Québec Inc. [1995] R.D.J. 56 (C.S.)

Note de l'auteur: L'information contenue dans cette chronique est générale et ne constitue pas un avis juridique.

février 01, 2005

La confidentialité en publicité

Vous désirez augmenter votre chiffre d’affaires et vous croyez que la prospection commerciale pourrait vous être utile ? Il existe cependant un encadrement juridique que doivent suivre les entreprises.

Législations concernant la protection des renseignements personnels

En 1998 s'est amorcé un processus législatif visant l'adoption d'une loi devant assurer la protection de la vie privée dans le secteur privé, notamment en ce qui concerne les transactions commerciales par voies électroniques. Cette loi, sanctionnée en avril 2000, s'intitule la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques.

Le but premier de cette loi est d'assurer une meilleure protection de la vie privée des Canadiens dans le secteur privé. Étant une loi fédérale, elle ne s'applique qu'aux organismes du gouvernement canadien en ce qui a trait à la collecte et à la communication des renseignements personnels provenant des entreprises privées.

Puisque le Québec a adopté une loi assez similaire, les organisations visées seront exemptées de l’application de la loi fédérale. La loi québécoise actuelle sur la protection de la vie privée ressemblant sensiblement à la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques, le Québec sera exempté de l’application de celle-ci. Pour sa part, la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé vient compléter les dispositions du Code civil du Québec en matière de protection de la vie privée. Le Québec reconnaît ainsi la protection des renseignements personnels comme un droit fondamental inscrit dans le Code civil et en donne la définition suivante : "Est un renseignement personnel, tout renseignement qui concerne une personne physique et permet de l'identifier" en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé. Cependant, cette définition ne règle pas le problème de la protection des renseignements personnels dans la mesure où le Code civil du Québec n'impose aucune obligation aux détenteurs des renseignements personnels d'informer la personne concernée de l'existence d'un dossier à son sujet. C'est à cette lacune que la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé pallie en prévoyant une obligation d'informer la personne de l'existence d'un dossier la concernant.

Obligations des entreprises

La Commission d’accès à l’information du Québec, chargée d’administrer la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, identifie les obligations auxquelles les entreprises privées doivent se soumettre afin de se conformer à la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé.

Toute entreprise de biens et de services doit se conformer à la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé si elle recueille, détient, utilise ou communique des renseignements personnels. Afin de garantir à tout individu le contrôle de son propre dossier, l'entreprise doit, de façon générale, respecter certaines règles.

Lors de la cueillette des renseignements personnels l'entreprise doit

- détenir un intérêt sérieux et légitime pour constituer un dossier;
- préciser le pourquoi d'un dossier en inscrivant son objet;
- s'adresser à la personne concernée, à moins que celle-ci ou la Loi n'autorise la cueillette auprès d'autrui;
- ne recueillir que les renseignements nécessaires à l'objet inscrit;
- informer la personne concernée de l'objet du dossier, de son utilisation et des catégories de personnes y ayant accès au sein de l'entreprise;
- informer la personne concernée de l'endroit où sera détenu son dossier, de ses droits d'accès et de rectification.

De plus, lors de la détention, de l'utilisation ou de la communication des renseignements personnels, l'entreprise doit :

- obtenir le consentement de la personne concernée pour utiliser des renseignements personnels;
i) lorsque ceux-ci ne sont pas pertinents à l'objet du dossier;
ii) lorsque l'objet du dossier est accompli;
iii) pour communiquer des renseignements personnels à autrui;
- s'assurer que ce consentement à l'utilisation ou à la communication est manifeste, libre, éclairé, donné à des fins spécifiques et d'une durée limitée.

Les listes comportant les noms, les adresses et les numéros de téléphone des membres, des clients et des employés d'une entreprise peuvent être communiquées ou utilisées à des fins de prospection commerciale ou philanthropique. Le cas échéant, l'entreprise doit fournir à la personne concernée une occasion valable de refuser la communication ou l'utilisation de tels renseignements.

Par ailleurs, l'entreprise, qui utilise une liste nominative doit s'identifier et informer le destinataire de son droit de faire retrancher de la liste tout renseignement le concernant.

Par contre, dès que l'entreprise utilise la liste nominative à des fins de prospections commerciales ou autres, il faut donner une occasion valable à la personne concernée de refuser que son nom y figure. Il faut prévoir pour l'exercice de ce droit de retrait (opting out) des formules qui permettent à la personne concernée d'accepter ou de refuser l'inscription de son nom sur la liste.

Une entreprise peut évidemment compter plusieurs sociétés affiliées ou avoir une participation majoritaire dans d'autres sociétés commerciales. C'est le cas dans le secteur financier où l'on peut retrouver dans un même groupe: une banque, une maison de courtage en valeurs mobilières et une compagnie d'assurance.

Ces sociétés peuvent-elles échanger leur liste nominative? Oui, si la personne concernée s'est vu offrir la possibilité d'accepter ou de refuser que les renseignements personnels la concernant soient utilisés à de telles fins.

Finalement, dans un contexte international, afin de garantir, au-delà des frontières, les droits des individus sur les informations qui les concernent tout en facilitant leur libre circulation et compte tenu de l'essor pris par le traitement automatique de l'information, qui permet de transmettre de vastes quantités de données en quelques secondes à travers les frontières nationales et même à travers les continents, il a fallu étudier la question de la protection de la vie privée sous l'angle des données de caractère personnel. Des législations relatives à la protection de la vie privée ont été adoptées dans près de la moitié des pays de l'OCDE (l'Allemagne, l'Autriche, le Canada, le Danemark, les Etats-Unis, la France, le Luxembourg, la Norvège et la Suède ont promulgué une législation. La Belgique, l'Espagne, les Pays-Bas et la Suisse ont établi des projets de loi) en vue de prévenir des actes considérés comme constituant des violations des droits fondamentaux de l'homme, tels que le stockage illicite de données de caractère personnel qui sont inexactes, l'utilisation abusive ou la divulgation non autorisée de ces données.


Note de l'auteur: L'information contenue dans cette chronique est générale et ne constitue pas un avis juridique.

janvier 01, 2005

Vos contrats de publicité

Vous démarrez votre compagnie de publicité et vous êtes à la recherche de nouveaux clients. Avez-vous défini le contrat qui vous liera à votre clientèle ? Quels sont les éléments essentiels à inclure ?

La nature du contrat

Selon le Code civil du Québec (C.c.Q.), le contrat est défini à l'article 1378 C.c.Q. comme "un accord de volonté, par lequel une ou plusieurs personnes s'obligent envers une ou plusieurs autres à exécuter une prestation.". De plus, étant une entreprise de service, l’article 2098 C.c.Q le définit comme étant « un contrat de service […]par lequel une personne, selon le cas l'entrepreneur ou le prestataire de services, s'engage envers une autre personne, le client, à réaliser un ouvrage matériel ou intellectuel ou à fournir un service moyennant un prix que le client s'oblige à lui payer ». Le prestataire de services a le libre choix des moyens de d’exécution du contrat et il n’existe aucun lien de subordination quant à son exécution. À moins de stipulation contraire spécifiant le caractère personnel du contrat (la photo doit être prise par Untel et personne d’autre), le contrat se rattache à l’exécution de l’ouvrage et non à la personne même de l’entrepreneur. Vous devez obligatoirement retrouver, en vertu de l'article 1385 C.c.Q. les éléments essentiels à la formation du contrat, soit :

I) La présence de personnes capables de contracter, soit être en pleine possession de leurs moyens au moment où il y a l’entente ;

II) L’échange de consentement, soit en énonçant clairement et librement leur acception au contrat, sous peine de nullité ;

III) Une cause, soit une raison subjective et personnelle qui pousse la personne à s’engager ;

IV) Un objet, soit l’opération juridique principale que les parties avaient en vue au moment où elles ont réalisé l’accord de volonté, par exemple l’achat d’un espace publicitaire.

Les éléments du contrat

Plus concrètement, le contrat doit comprendre

I) La nature du contrat, soit le type de contrat que vous signez permettant de clarifier la teneur de l'entente et de se mettre sur la même longueur d'onde que l'autre partie ;

II) La date et le lieu afin de déterminer l’endroit où le contrat a été conclu et à quel moment débute le contrat ;

III) L'identification des parties, spécifiez les noms et prénoms, les noms des entreprises, adresses et spécifiez à quel titre vous agissez dans le cadre de l'entente ;

IV) Les droits et les obligations des parties, cette section doit présenter et exposer clairement les droits et les obligations de chaque partie désignée. Elle permet d'établir précisément vos engagements et ceux de votre cocontractant. Étant un contrat de services, les droits et obligations doivent porter, entre autres, sur les tâches à être réalisées, le délai alloué pour les faire, les modes de paiement, l'évaluation de la qualité du travail et la responsabilité en cas de bris ou d'erreurs commises lors de l'exécution du travail.

V) L'entrée en vigueur du contrat, il est important de préciser le moment où les parties s'entendent pour que le contrat entre en vigueur. Il peut s'agir de la date de signature du contrat ou toute autre date ou circonstance spécifiée ;

VI) La durée du contrat, le contrat prend fin à la date fixée. Il peut être également utile de préciser les circonstances pouvant mettre un terme au contrat et dans quel délai.

VII) La fin du contrat, à quel moment prendra fin le contrat. Il peut être également utile de préciser les circonstances pouvant mettre un terme au contrat et dans quel délai.

VIII) Le mode de règlement des conflits, il est important de se mettre à l'abri de conflits éventuels sur son interprétation ou sur son non-respect. Il est alors utile de vous entendre d'avance sur une façon de les résoudre avant qu'ils ne surviennent. Cette précaution peut vous éviter d'avoir à vous engager dans une lutte judiciaire coûteuse en temps et en argent. Vous pouvez choisir d'aller en arbitrage, en médiation ou encore en conciliation.

IX) La signature et les initiales des parties, bien que la signature d'un contrat ne soit pas essentielle pour que celui-ci prenne effet, mais elle est fortement recommandée. Elle joue un rôle majeur, puisqu'elle est la confirmation que les parties ont manifesté leur consentement. En plus de la signature, il est recommandé d'apposer ses initiales sur chaque page du contrat. Cette petite attention démontre que toutes les pages ont été lues et que leur contenu a été accepté par les parties. Les initiales facilitent également la preuve qu'aucune page n'a été ajoutée ou substituée à l'entente après la signature. Assurez-vous d'en conserver une copie signée.

De plus, l'Internet nous a apporté les contrats que les juristes appellent "click-wrap", ou contrats que l'on conclut en cliquant, pendant que l'on visite un site Web. Ce contrat, comme le précédent, ne comporte pas de signature. Cependant, les conditions du contrat sont connues avant que le contrat ne soit conclu. Peut-on valablement conclure une entente en "cliquant" ? La Cour supérieure de l'Ontario a répondu à cette question récemment lorsque deux individus ont voulu poursuivre Microsoft devant un tribunal Ontarien, alors que le contrat d'adhésion au Microsoft Network (MSN) qu'ils avaient "cliqué" prévoyait que tout litige devait être entendu dans l'État de Washington. Le juge réfuta les arguments soulignant qu’une des clauses était peu visible dans l'ensemble du contrat et ne figurait pas sur l'écran au moment où ils avaient cliqué en faisant une analogie directe avec un contrat intervenu sur papier et signé. Quant au fait que la clause était peu visible, il dit que même les petits caractères sur un contrat papier lient le signataire. Quant à l'absence de la clause sur l'écran, il dit que ce n'est pas parce qu'une clause ne se situe pas sur la page de signatures, du contrat papier, qu'elle est invalide. Le signataire a la responsabilité de lire toutes les pages.

Bien que les systèmes de droit applicables aux contrats soient différents au Québec et en Ontario (Droit civil et Common Law), il est à prévoir que le résultat d'un tel procès serait similaire au Québec. En effet, le Code civil du Québec contient des dispositions qui précisent qu'une entente est réalisée lorsqu'il y a échange de consentement entre les parties. L’enjeu de l'admissibilité et la question de la valeur probante de l'inscription d'un acte juridique sur support informatique est source de grands débats juridiques. Dans l'état actuel du droit, en se remettant à ces articles tels que présentement rédigés, si l'on accepte de considérer cette inscription comme un écrit, on vient immédiatement se heurter au dilemme de réconcilier la situation de l'inscription informatique qui serait signée versus l'inscription électronique non signée et la valeur probante divergente qui résulte alors entre l'inscription informatisée et le même acte sur support papier. Car un écrit traditionnel signé ne peut se contredire par témoignage (art. 2863 C.c.Q.), tandis que ce genre de témoignage demeure admissible dans le cas de l'inscription informatisée. Il y a des situations où les enjeux d’un contrat peuvent s’avérer très important. Il vaut mieux consulter un avocat pour prévenir les litiges.

Note de l'auteur: L'information contenue dans cette chronique est générale et ne constitue pas un avis juridique.

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