septembre 01, 2013

Décision sur les cartes de crédit rendue par le Tribunal de la concurrence



Une décision rejetant la demande déposée par le commissaire de la concurrence rendue récemment a attiré mon attention. Si les motifs du Tribunal sont confidentiels pour l’instant afin d’assurer la protection adéquate des éléments de preuve confidentiels, il est bon de rappeler le fondement de la décision.

Le 15 décembre 2010, le Bureau de la concurrence a présenté une demande au Tribunal contestant les règles que Visa et MasterCard imposent aux commerçants qui acceptent leurs cartes de crédit.  Dans l’affaire Commissaire de la concurrence c. Visa Canada Corporation et MasterCard International Incorporated (CT-2010-10) les  juge Michael L. Phelan, M. Wiktor Askanas et M. Keith C. Montgomery ont  rejeté la demande déposée par le commissaire de la concurrence, sans dépens. Le Tribunal a conclu que l’article 76 de la Loi sur la concurrence exige l’existence d’une revente et que le commissaire de la concurrence n’a pas démontré que les clients des défenderesses revendent les produits de celles-ci.

L’article 76 de la Loi sur la concurrence stipule que

« (1) Sur demande du commissaire ou de toute personne à qui il a accordé la permission de présenter une demande en vertu de l’article 103.1, le Tribunal peut rendre l’ordonnance visée au paragraphe (2) s’il conclut, à la fois :

    a) que la personne visée au paragraphe (3), directement ou indirectement :

        (i) soit, par entente, menace, promesse ou quelque autre moyen semblable, a fait monter ou empêché qu’on ne réduise le prix auquel son client ou toute personne qui le reçoit pour le revendre fournit ou offre de fournir un produit ou fait de la publicité au sujet d’un produit au Canada,

        (ii) soit a refusé de fournir un produit à une personne ou catégorie de personnes exploitant une entreprise au Canada, ou a pris quelque autre mesure discriminatoire à son endroit, en raison de son régime de bas prix;

    b) que le comportement a eu, a ou aura vraisemblablement pour effet de nuire à la concurrence dans un marché.

(2) Le Tribunal peut, par ordonnance, interdire à la personne visée au paragraphe (3) de continuer de se livrer au comportement visé à l’alinéa (1)a) ou exiger qu’elle accepte une autre personne comme client dans un délai déterminé aux conditions de commerce normales.

(3) Peut être visée par l’ordonnance prévue au paragraphe (2) la personne qui, selon le cas :

    a) exploite une entreprise de production ou de fourniture d’un produit;

    b) offre du crédit au moyen de cartes de crédit ou, d’une façon générale, exploite une entreprise dans le domaine des cartes de crédit;

    c) détient les droits et privilèges exclusifs que confèrent un brevet, une marque de commerce, un droit d’auteur, un dessin industriel enregistré ou une topographie de circuit intégré enregistrée.»

Selon le communiqué, le Tribunal a fondé son analyse dans l’éventualité où il aurait eu tort relativement à son interprétation de l’article 76. Selon cette analyse subsidiaire, le Tribunal a tenu pour acquis que les défenderesses se sont livrées à des pratiques de maintien des prix (selon la définition donnée par le commissaire) en appliquant la règle de non-imposition de frais supplémentaires, règle interdisant aux commerçants d’imposer des frais supplémentaires aux clients qui utilisent des cartes de crédit. Le Tribunal a ainsi conclu que ce comportement a eu pour effet de nuire à la concurrence.

Or, le Tribunal a jugé que, même selon cette analyse subsidiaire, il aurait refusé de rendre une ordonnance et a fait remarquer que la meilleure réponse aux préoccupations soulevées par le commissaire consiste en un cadre réglementaire. Le Tribunal a indiqué à cet égard que l’expérience dans d’autres pays a révélé que les consommateurs ont soulevé leurs préoccupations relativement à l’imposition de frais supplémentaires et qu’il fallait alors intervenir dès que possible par voie de règlement.

Le Tribunal n’a pas adjugé de dépens. Le Tribunal a fait remarquer que le commissaire a présenté des arguments pertinents, même s’il n’a pas eu entièrement gain de cause.

Note de l'auteur: L'information contenue dans cette chronique est générale et ne constitue pas un avis juridique

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