Me sachant étudiante au Certificat en droit, les gens me demandent souvent l’intérêt de la marque de commerce, en dehors de son côté créatif. Pour tout créatif amoureux de la publicité, il faut comprendre que ces subtilités vont bien au-delà de la simple bureaucratie. La marque de commerce est un droit de propriété et les nombreux litiges devant la Cour fédérale du Canada, ainsi que les tribunaux de droit commun des provinces confirment qu’elle constitue un actif intellectuel qu’il convient de protéger et de défendre.
Dans l’arrêt Pink Panther Beauty Corp. c. United Artists Corp., (1998) 3 C.F. 534, 546 (C.A.), désistement du pourvoi à la Cour suprême du Canada produit le 21 juin 1999, la Cour d’appel a souligné que « les marques de commerce sont protégées par une législation et l'action en imitation frauduleuse a été codifiée à l'alinéa 7c) de la Loi. Toutefois, l'étendue de la protection qu'offre la Loi est plus importante que celle qu'accordait l'ancienne common law. Premièrement, le demandeur, dans une procédure en contrefaçon (ou l'opposant, dans une procédure d'opposition), n'a pas à démontrer que les biens ou les services sont mis en marché dans la même région, comme l'exigeait l'ancienne common law. La marque déposée est valide partout au Canada et elle permet à son propriétaire de jouir du droit exclusif de l'employer en liaison avec des marchandises ou des services déterminés, et ce, dans tout le pays. De même, pour avoir gain de cause, il n'est plus nécessaire de prouver des dommages ni l'existence d'une tentative de tromperie ».
Tout d’abord, définissons le concept de marque de commerce, tel que défini par l’OPIC (Office de la propriété intellectuelle du Canada, organisme de service spécial (OSS) au sein d’Industrie Canada, est le principal responsable de l'administration et le traitement des demandes de propriété intellectuelle de ceux-ci), qui sert à distinguer les produits ou les services d'une personne ou d'un organisme d'autres produits ou services offerts sur le marché . Une marque de commerce enregistrée a été approuvée et inscrite au Registre des marques de commerce tenu par le Bureau des marques de commerce. L'enregistrement est le titre de propriété. Une marque de commerce non enregistrée peut aussi être reconnue par le droit coutumier comme étant la possession de son propriétaire, selon les circonstances. Cependant, il est plus difficile de faire reconnaître son droit de propriété devant les tribunaux. L’intérêt pour une compagnie d’enregistrer sa marque de commerce est que l'enregistrement est une preuve irréfutable (présomption légale) de propriété exclusive dans l'ensemble du Canada et aide son propriétaire à écarter les contrefacteurs éventuels. Il permet au propriétaire de protéger plus facilement ses droits en cas de contestation puisqu'il incombe au contrefacteur de prouver ses droits dans tout litige. Le processus d'enregistrement, grâce aux vérifications approfondies qu'il comporte en vue de dépister les marques de commerce en situation conflictuelle, permet au requérant de revendiquer une marque unique et d'éviter de violer les droits de tiers. Par contre, le fait d’enregistrer une marque de commerce ne décharge pas le propriétaire de la responsabilité de veiller à ses droits. Il doit s’assurer que personne d’autre n’utilise cette marque. L’OPIC n’a pas pour vocation de protéger les propriétaires contre l’utilisation illégale de leur marque par d’autres personnes. Aussi, le fait de négliger ses droits de propriétaire peut entraîner de graves conséquences et diminuer les chances de faire respecter son droit exclusif.
Des particuliers, des sociétés, des syndicats ou des associations légales peuvent enregistrer leur marque de commerce, pourvu que ceux-ci répondent aux exigences de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13. Cet enregistrement est valide pour une durée de 15 ans et est par la suite renouvelable tous les 15 ans moyennant le paiement des droits exigibles. Pour enregistrer sa marque de commerce, le demandeur doit produire une demande auprès du Bureau des marques de commerce à Gatineau (Québec). La demande subit un examen rigoureux pour s'assurer qu'elle réponde aux exigences de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13.
L'enregistrement d'une marque de commerce comporte les étapes suivantes : (1) recherche préliminaire des marques de commerce existantes, (2) une demande d'enregistrement, (3) l’examen de la demande effectué par le Bureau des marques de commerce, (4) la publication de la demande dans le Journal des marques de commerce, (5) le délai accordé au public pour produire une déclaration d'opposition à la demande (contestation), (6) l'admission et l'enregistrement (en l’absence d'opposition).
Veuillez toutefois noter que l’enregistrement fait au Canada ne protége pas les droits du propriétaire dans les autres pays. En attendant que le Canada adhère au Protocole de Madrid permettant au propriétaire de protéger sa marque dans plusieurs pays comme si elle avait été déposée directement dans chacun des pays spécifiés dans la demande de dépôt, le propriétaire de la marque doit déposer une demande d'enregistrement dans chacun des pays dans lesquels elle revendique la protection accordée aux marques. Avant de déposer de telles demandes à l’étranger, la recherche doit être effectuée dans chacun des pays concernés pour s’assurer que la marque en question est disponible et qu’une marque similaire n’est pas utilisée pour des produits ou des services similaires.
Certaines multinationales effectuent une série de recherches nationales avant de lancer un produit à l’échelle internationale. Que vous décidiez de limiter votre publicité à l’échelle nationale, la marque de commerce étant un droit de propriété, assurez vous d’éviter d’attirer l’attention du public d’une façon qui puisse causer une certaine confusion avec une autre entreprise, nationale ou internationale. Cette dernière aura derrière elle plus d’un an de démarches afin de remplir les formalités de l’Office de la propriété intellectuelle du Canada afin de protéger sa marque.
Note de l'auteur: L'information contenue dans cette chronique est générale et ne constitue pas un avis juridique.