décembre 01, 2012
Le délai pour agir
Il arrive que certains droits soient violés mais que le délai pour les faire faire valoir soit dépassé, d’où l’importance d’agir rapidement. L’arrêt Chaussures Régence inc. c. Naturmania inc., 2011 QCCS 744 (CanLII) illustre bien ce propos.
Rappelons les faits. Régence est une entreprise qui, depuis sa fondation [1979], œuvre dans le domaine de la conception, la fabrication et la vente en gros de bottes sous différentes appellations, dont celle de « Acton ». De leur côté, Naturmania et 9144 sont des entreprises liées qui, depuis leur fondation, oeuvrent dans le domaine de la vente et la distribution d'accessoires, de vêtements et de bottes de chasse. Elles commercialisent leurs produits sous le nom commercial « Action ». Le 8 juin 1990, Acton international inc., l'entreprise qui commercialise des bottes sous le nom commercial « Acton », demande à l'Office de la propriété intellectuelle du Canada d'enregistrer une marque de commerce pour ce nom. Acton international inc. fait alors valoir que le nom « Acton » est employé au Canada, par elle-même et ses prédécesseurs, depuis 1937. De ce fait, elle soutient que ce nom est devenu distinctif et qu'il l'est toujours au moment du dépôt de sa demande. Le 29 septembre 1995, la demande produite par Acton international inc. est approuvée en tant que marque de commerce.
À la fin des années 90, le fondateur des magasins SAIL, M. Côté, commence à utiliser le nom commercial « Action » pour commercialiser et vendre des accessoires de chasse et de pêche. En 2002, M. Côté s'associe à M. Claude Bernadet, le principal Actionnaire et administrateur des défenderesses Naturmania et 9144. Ensemble, ils commercialisent, distribuent et vendent des vêtements de chasse sous le nom « Action ». En mai 2003, par l'intermédiaire de la société 159182 Canada inc., M. Côté demande à Régence de fabriquer 8000 paires de chaussons pour bottes et de coudre sur ces chaussons des étiquettes « Action ». Au cours de l'année 2004, Régence obtient une licence du propriétaire de la marque de commerce « Acton ». Elle entreprend ainsi la commercialisation, la distribution et la vente de bottes et chaussures sous le nom « Acton ». Au cours de l'année 2008, il se produit deux événements démontrant qu'il peut exister une certaine forme de confusion entre les noms « Acton » et « Action ». D'abord, un distributeur de produits « Acton » retourne à Régence un lot de bottes de chasse « Acton » défectueuses. Parmi ce lot, on retrouve une paire de bottes « Action » qui ressemblent aux bottes « Acton ». Puis, en septembre 2008, Régence est informée qu'une publicité de l'un de ses distributeurs, Tony Pappas inc., identifie des bottes « Acton » sous le nom « Action ». Régence attribue ces méprises à la ressemblance qui existe entre les noms « Acton » et « Action ». Elle fait alors peu de cas du fait que les bottes de chasse « Acton » sont elles-mêmes, depuis 2006, des copies des bottes de chasse « Action ». À la suite de ces événements, soit le 2 octobre 2008, Régence met formellement en demeure Naturmania de cesser d'utiliser le nom commercial « Action ». Puis, le 17 février 2009, devant le refus d'obtempérer de Naturmania, elle entreprend le recours en injonction dont le Tribunal est saisi.
Si le Tribunal en arrive à la conclusion que l'usage du nom commercial « Action », lorsque utilisé en lien avec des chaussures ou des bottes, viole la marque de commerce « Acton », il souligne toutefois que le fait que Régence savait que des bottes étaient commercialisées sous le nom « Action », jamais Régence ne leur a-t-elle reproché, avant le 2 octobre 2008, le fait qu'elles utilisent le nom « Action » pour vendre ou commercialiser des bottes de chasse. Selon le Tribunal, il est difficile de soutenir que Régence n'aurait appris qu'en 2008 que des bottes étaient commercialisées sous le nom de « Action » alors qu'en 2003, elle a fabriqué, contre rémunération, 4000 chaussons pour bottes « Action ». Le risque probable de confusion entre le nom commercial « Action » et la marque de commerce « Acton » aurait dû être dès lors soulevé par Régence. Or, ce n'est pas ce qu'elle a fait. Elle a attendu cinq ans avant de réagir. L’inaction lui est fatale, que ce soit sous l'angle d'une fin de non-recevoir ou encore, en vertu des règles de la prescription extinctive. Le Tribunal a donc rejeté la demande.
Note de l'auteur: L'information contenue dans cette chronique est générale et ne constitue pas un avis juridique
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