Une
décision rejetant la demande déposée par le commissaire de la concurrence
rendue récemment a attiré mon attention. Si les motifs du Tribunal sont confidentiels
pour l’instant afin d’assurer la protection adéquate des éléments de preuve confidentiels,
il est bon de rappeler le fondement de la décision.
Le 15 décembre 2010, le
Bureau de la concurrence a présenté une demande au Tribunal contestant les
règles que Visa et MasterCard imposent aux commerçants qui acceptent leurs
cartes de crédit. Dans l’affaire Commissaire
de la concurrence c. Visa Canada Corporation et MasterCard International
Incorporated (CT-2010-10) les juge
Michael L. Phelan, M. Wiktor Askanas et M. Keith C. Montgomery ont rejeté la demande déposée par le commissaire
de la concurrence, sans dépens. Le Tribunal a conclu que l’article 76 de la Loi
sur la concurrence exige l’existence d’une revente et que le commissaire de
la concurrence n’a pas démontré que les clients des défenderesses revendent les
produits de celles-ci.
L’article 76 de la Loi sur la concurrence stipule
que
« (1) Sur
demande du commissaire ou de toute personne à qui il a accordé la permission de
présenter une demande en vertu de l’article 103.1, le Tribunal peut rendre
l’ordonnance visée au paragraphe (2) s’il conclut, à la fois :
a) que la personne visée au paragraphe (3),
directement ou indirectement :
(i) soit, par entente, menace, promesse
ou quelque autre moyen semblable, a fait monter ou empêché qu’on ne réduise le
prix auquel son client ou toute personne qui le reçoit pour le revendre fournit
ou offre de fournir un produit ou fait de la publicité au sujet d’un produit au
Canada,
(ii) soit a refusé de fournir un
produit à une personne ou catégorie de personnes exploitant une entreprise au
Canada, ou a pris quelque autre mesure discriminatoire à son endroit, en raison
de son régime de bas prix;
b) que le comportement a eu, a ou aura
vraisemblablement pour effet de nuire à la concurrence dans un marché.
(2) Le Tribunal
peut, par ordonnance, interdire à la personne visée au paragraphe (3) de
continuer de se livrer au comportement visé à l’alinéa (1)a) ou exiger qu’elle
accepte une autre personne comme client dans un délai déterminé aux conditions
de commerce normales.
(3) Peut être
visée par l’ordonnance prévue au paragraphe (2) la personne qui, selon le cas :
a) exploite une entreprise de production ou
de fourniture d’un produit;
b) offre du crédit au moyen de cartes de
crédit ou, d’une façon générale, exploite une entreprise dans le domaine des
cartes de crédit;
c) détient les droits et privilèges
exclusifs que confèrent un brevet, une marque de commerce, un droit d’auteur,
un dessin industriel enregistré ou une topographie de circuit intégré
enregistrée.»
Selon le
communiqué, le Tribunal a fondé son analyse dans l’éventualité où il
aurait eu tort relativement à son interprétation de l’article 76. Selon cette
analyse subsidiaire, le Tribunal a tenu pour acquis que les défenderesses se
sont livrées à des pratiques de maintien des prix (selon la définition donnée
par le commissaire) en appliquant la règle de non-imposition de frais
supplémentaires, règle interdisant aux commerçants d’imposer des frais
supplémentaires aux clients qui utilisent des cartes de crédit. Le Tribunal a
ainsi conclu que ce comportement a eu pour effet de nuire à la concurrence.
Or, le Tribunal a jugé que, même selon cette analyse
subsidiaire, il aurait refusé de rendre une ordonnance et a fait remarquer que
la meilleure réponse aux préoccupations soulevées par le commissaire consiste
en un cadre réglementaire. Le Tribunal a indiqué à cet égard que l’expérience
dans d’autres pays a révélé que les consommateurs ont soulevé leurs
préoccupations relativement à l’imposition de frais supplémentaires et qu’il
fallait alors intervenir dès que possible par voie de règlement.
Le Tribunal n’a pas adjugé de dépens. Le Tribunal a
fait remarquer que le commissaire a présenté des arguments pertinents, même
s’il n’a pas eu entièrement gain de cause.
Note de
l'auteur: L'information contenue dans cette chronique est générale et ne
constitue pas un avis juridique
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