Chers lecteurs,
Vous pardonnerez l’entorse à la ligne éditoriale en publiant cette note. Car c’est un cas associé au certificat de sécurité qui m’a fait découvrir le droit et les droits de la personne en 1985. C’est donc avec joie que j’ai appris le jugement de la Cour suprême du Canada concernant le caractère jugé inconstitutionnel des certificats de sécurité.
La Cour a mis en évidence que les principes de justice fondamentale requièrent que les individus nommés dans un certificat de sécurité doivent avoir la possibilité effective de répondre aux accusations et de contester la preuve présentée, ce qu’ils ne peuvent faire selon la procédure actuelle.
Le jugement souligne la nécessité de fournir de véritables possibilités de faire réviser la décision initiale de détention ainsi que la détention continue et les conditions de libération. La Cour a spécifiquement annulé une disposition qui permet qu’un ressortissant étranger soit détenu sans révision pour 120 jours après que le certificat de sécurité ait été déclaré invalide, considérant que cela constitue une détention arbitraire.
La Cour reconnaît l’impact sérieux d’une détention indéfinie sans accusation, et la possibilité qu’il en résulte un traitement cruel et inusité « La détention indéfinie dans des circonstances où la personne détenue n’a pas l’espoir d’être libérée ou d’avoir recours à une procédure légale permettant éventuellement sa libération peut causer du stress psychologique et ainsi constituer un traitement inusité et cruel ».
Ces certificats permettent la détention ou l'expulsion d'étrangers et de résidents permanents considérés comme dangereux, sur la base de simples soupçons raisonnables.
Dans une décision unanime, le plus haut tribunal du pays a conclu que les personnes visées par des certificats de sécurité n'avaient pas suffisamment accès à la preuve contre elles et que cela constituait une violation de leurs droits fondamentaux.
La juge en chef Beverley McLachlin a mentionné qu'«[il] faut soit communiquer les renseignements nécessaires à la personne visée, soit trouver une autre façon de l'informer pour l'essentiel. Ni l'un ni l'autre n'a été fait en l'espèce» afin de respecter la Charte canadienne des droits et libertés.
Le jugement affirme que les mesures de lutte contre le terrorisme ne peuvent jamais être utilisées pour miner les droits humains. Toujours selon la Juge en Chef Mclachlin, « les préoccupations de sécurité ne peuvent pas être utilisées pour excuser des procédures qui ne se conforment pas aux principes de justice fondamentale ».
Selon le plus haut tribunal du pays, le Canada pourrait trouver une meilleure manière d'assurer sa sécurité tout en respectant les droits de la personne sur son territoire. La Cour laisse toutefois au parlement le soin de décider de la méthode à privilégier.
«C'est au législateur qu'il appartient de déterminer précisément quels correctifs doivent être apportés, mais il est évident qu'il doit faire davantage pour satisfaire aux exigences d'une société libre et démocratique».
Seule ombre au tableau : la Cour a jugé que la détention prolongée de personnes soupçonnées de terrorisme ne constituait pas un châtiment cruel et inusité à condition qu'elle soit réexaminée périodiquement par un juge, et ce, malgré la protection contre « tous traitements ou peines cruels et inusités » apportéé par la Charte des droits et libertés. Or, la jurisprudence tend à démontrer que l'effet de cette peine ne doit pas être exagérément disproportionné à ce qui aurait été approprié. Bien que la lutte au terrorisme est un objectif social important, la crainte d'une participation par les soupçonnées de terrorisme représente-t-elle une des hypothèses qui pourraient raisonnablement se concrétiser, soulevées par la jurisprudence?
Finalement, le jugement n'entraînera cependant pas de changements immédiats dans la vie de son mari ni dans celles des cinq autres hommes visés par des certificats de sécurité au pays.
Ainsi, ceux qui sont détenus le demeureront, tandis que ceux qui ont été libérés devront continuer à respecter leurs conditions. Ils ont cependant la certitude que les certificats émis contre eux seront annulés dans un an. Si le gouvernement souhaite limiter leur liberté à nouveau, il devra le faire en usant un nouveau processus.
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